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Leur société
Gaz et électricité : les profits supportent mal le gel
« Ni les tarifs de l’électricité ni ceux du gaz n’augmenteront durant l’hiver », a déclaré le Premier ministre Édouard Philippe le 4 décembre. Mais ni EDF ni les autres distributeurs ne veulent voir leurs bénéfices gelés.
Les tarifs du gaz ont augmenté de plus de 16 % cette année dont 5,79 % en novembre et cette hausse continuera à s’appliquer, hiver comme été. Pour l’électricité, dont le prix a augmenté de 35 % en dix ans, une nouvelle hausse de 2,3 % selon Le Parisien, de 8 à 9 % selon LCI, avait été demandée pour 2019 par les distributeurs d’électricité concurrents d’EDF, parmi lesquels Engie (ex-Gaz de France), Direct Énergie qui vient d’être racheté par Total, et les supermarchés Leclerc. Ils ont évoqué un possible recours devant les tribunaux contre le gel annoncé par le gouvernement, comme ils l’avaient fait en 2016 contre un décret de la ministre de l’Écologie, Ségolène Royal, qui avait réduit à 2,5 % une augmentation du tarif réglementé d’EDF (le tarif « bleu ») au lieu des 5 % initialement prévus. Ils s’estimaient floués dans leur espoir de capter des clients qui auraient fui EDF dont les tarifs seraient devenus trop élevés. Le Conseil d’État leur avait donné raison, imposant à près de 28 millions d’usagers d’EDF une augmentation d’environ 1,50 euro par mois pendant dix-huit mois.
Presque aucun de ces distributeurs ne produit d’électricité, mais tous disposent d’une loi taillée sur mesure qui oblige EDF à leur vendre à prix fixe, 42 euros par mégawatt-heure, jusqu’à un quart de sa production d’origine nucléaire. Or le prix du marché dépasse actuellement 60 euros. Avec une telle ristourne de plus de 30 % sur leur prix d’achat, il ne leur est pas difficile de faire concurrence à EDF pour revendre cette électricité et gagner ainsi une centaine de milliers de clients par mois avec l’aide d’une publicité racoleuse, tout en préservant une marge confortable ! L’appétit venant en mangeant, les prévisions d’achats d’électricité de ces distributeurs pour l’année prochaine dépassent d’un tiers la quantité d’électricité qu’EDF est obligée de leur céder à prix réduit. Ils devront donc en principe payer cette part au prix fort, qu’ils comptent refacturer aux consommateurs.
Parmi les usagers qui sont restés au tarif réglementé d’EDF, quatre sur cinq subissent déjà depuis l’été dernier une augmentation du prix de l’abonnement à laquelle devrait s’ajouter en 2019 une hausse des tarifs. Quand le prix de marché de l’électricité augmente, comme c’est le cas depuis deux ans, des dispositions légales prévoient en effet de le répercuter sur le tarif réglementé, au bénéfice d’EDF. Celui-ci a déjà atteint 1,7 milliard d’euros au premier semestre de 2018, du fait notamment d’un plan de suppression de 5 900 emplois en quatre ans, ce qui permettra peut-être à EDF de réintégrer le CAC40, l’indice des 40 principales sociétés cotées en Bourse, dont elle est écartée depuis trois ans.
Deux jours après l’annonce du « gel » gouvernemental, le PDG d’EDF a déclaré qu’il compte bien alourdir la facture des usagers, à un moment ou à un autre. Comme l’écrit un journal financier, Le Revenu, la hausse du tarif réglementé d’EDF fait partie des « attentes du marché ».