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Cameroun : serviteur à vie de l’impérialisme français
Paul Biya a sans surprise été réélu président du Cameroun. Ce dictateur perpétue depuis 36 ans un pouvoir basé sur la corruption, la défense des intérêts de l’impérialisme français et une féroce dictature.
Le Cameroun n’a connu que deux présidents depuis son indépendance en 1960. Le premier, Ahmadou Ahidjo, fut installé à la direction du pays par l’armée et les services secrets français. Comme dans toutes les anciennes colonies africaines, il avait été sélectionné par les dirigeants de l’impérialisme français pour que le nouvel État perpétue le pillage du pays au profit des trusts français. L’armée française avait au préalable mené au Cameroun une guerre sauvage contre l’Union des Populations du Cameroun (UPC) dont le président Ruben Um Nyobe revendiquait la fin de la tutelle française et s’appuyait sur un soulèvement paysan massif. Il fut assassiné en 1958.
En 1982, Ahidjo transmit le pouvoir à son Premier ministre Paul Biya. Une fois encore, les intérêts de l’impérialisme français furent déterminants. « Le président Biya ne prend le pouvoir qu’avec le soutien d’Elf pour contenir la communauté anglophone de ce pays » expliquait Loïk Le Floc-Prigent, l’ex-patron de l’entreprise pétrolière Elf, bien placé pour connaître le dessous des cartes.
En 36 ans de règne, Paul Biya a bien rempli le rôle que lui assignaient les dirigeants de l’impérialisme français. Le pétrole, les minerais, le bois ont été bradés aux multinationales. Les trusts français en profitent largement. Bolloré a récupéré les ports, les aéroports, les chemins de fer et de grandes plantations où il exploite les travailleurs locaux dans des conditions inhumaines. Les compagnies françaises, Total et Perenco, assurent l’exploitation, le raffinage et la distribution du pétrole. Rougier y a exploité les bois précieux jusqu’en juillet dernier. Et on pourrait allonger la liste des sociétés françaises ou étrangères qui pillent le pays.
Cette vente à l’encan des ressources du pays va de pair avec une corruption massive. Chaque contrat donne lieu à des versements de pots-de-vins qui profitent avant tout au président et à son clan, mais aussi à une multitude de responsables à tous les niveaux. Les opposants, eux, sont systématiquement pourchassés, emprisonnés et parfois purement et simplement exécutés. En 2008, la répression des manifestations contre la vie chère fait plus d’une centaine de morts dans les grandes villes du pays.
Cette terreur systématique a aujourd’hui des conséquences particulièrement dramatiques dans la partie anglophone du pays. L’existence de cette minorité d’environ 20 % de la population est l’une des nombreuses aberrations de l’histoire coloniale. Le Cameroun fut en effet une colonie allemande jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale, à l’issue de laquelle la France et la Grande-Bretagne reçurent chacune le mandat de gouverner une partie du pays. Lors des indépendances des années soixante, une partie de la zone anglaise choisit de fusionner avec le Nigeria mais une autre, riche en gaz et en pétrole, se rallia au Cameroun francophone, attirée par la promesse d’un État fédéral.
Depuis, les Camerounais anglophones subissent la même oppression que le reste du pays, mais leur situation particulière a donné naissance à des mouvements réclamant un statut d’autonomie. D’abord le fait d’intellectuels, cette opposition a peu à peu évolué, du fait de la répression du pouvoir, vers des grèves d’enseignants et d’avocats il y a deux ans, pour en arriver aujourd’hui à des groupes armés. La population de la zone est aujourd’hui prise entre les feux croisés de l’armée camerounaise et de mouvements indépendantistes qui ont proclamé l’indépendance de l’Ambazonie, le nom qu’ils donnent à la région. Les deux bandes armées se disputent en fait le contrôle des énormes richesses du sous-sol de la région. Ainsi, les élections, qui n’ont pratiquement pas pu avoir lieu, ont été précédées d’un exode massif de la population craignant les violences des deux camps. Tel est le bilan du régime de prédation mis en place au Cameroun par l’impérialisme français.