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Grèce : quelle sortie du tunnel ?
L’accord conclu le 22 juin entre la Grèce et ses créanciers, c’est-à-dire l’Union européenne, la Banque centrale européenne, les fonds de sauvetage européens (FESF puis MES) et le FMI, est censé faire voir au pays le bout du tunnel. Mais il ne réduit pas la dette ni même ne supprime la mise en tutelle remplacée par une « surveillance renforcée ».
Cet accord rallonge de dix ans les échéances de remboursement d’une partie des prêts (96 milliards) repoussées à 2032 au lieu de 2022, mais avec la perspective de continuer à payer au moins jusqu’en 2069 !
La Grèce devant désormais emprunter sur les marchés financiers, l’accord prévoit un « matelas de sécurité » de 24 milliards d’euros pour permettre au pays de tenir un peu moins de deux ans, et qui vise surtout à rassurer les éventuels investisseurs.
Athènes devrait récupérer quelques milliards de profits faits par les banques centrales des pays européens sur les emprunts d’État grecs en leur possession. Mais ils seront placés sur un compte spécial du MES, avec accès contrôlé par les « partenaires », c’est-à-dire les créanciers européens.
Le gouvernement doit impérativement dégager chaque année un excédent budgétaire primaire (avant paiement de la dette) d’au moins 3,5 % du produit intérieur brut (PIB) jusqu’en 2022 et de 2,2 % en moyenne par la suite. Là une équipe passera vérifier tous les trois mois l’application des « réformes », qui sont autant d’attaques contre la population.
Comment dégager un excédent budgétaire autrement qu’en pressurant les travailleurs, les chômeurs, toutes les couches populaires, dans un pays dont l’économie est en faillite ? En huit ans de crise, le pays a perdu le quart de son PIB. Le gouvernement doit vendre tout ce qu’il peut et à des prix souvent bradés, comme les 66 % de son réseau de gaz cédés pour 535 millions d’euros à un consortium italo-belgo-espagnol. Compagnie ferroviaire, compagnie d’électricité, ports sont sur la liste des privatisations.
Le taux de chômage a triplé : il dépasse 21 %, et plus du double pour les jeunes, selon des chiffres officiels largement sous-estimés. Un demi-million de travailleurs, surtout des jeunes, ont quitté le pays. Les emplois précaires, saisonniers, à temps partiel sont la norme, comme le travail au noir. Un travailleur sur cinq n’a pas de couverture sociale : plusieurs centaines de milliers touchent leur salaire avec des mois de retard. Dans les supermarchés, certains salariés sont payés en bons d’achat sur leur propre magasin.
Après la loi sur les expulsions, c’est la dernière mesure sur les retraites, votée le 14 juin dernier, qui marque le plus la population. À partir de 2019, un nouveau calcul des pensions va toucher les futurs retraités mais aussi ceux qui le sont déjà. Près d’un million et demi d’entre eux vont voir leur pension actuelle baisser de 14 à 18 %. L’allocation de solidarité vieillesse versée aux retraités les plus faibles sera supprimée d’ici décembre 2019. Ce sont des mesures d’autant plus catastrophiques que les retraités sont souvent les seuls soutiens financiers de toute une famille.
Tsipras a déclaré : « Nous sommes très proches du moment où nous récolterons les fruits d’années de sacrifices. » Mais, des banquiers et des gouvernements à leur solde acharnés à faire payer aux pauvres la crise de leur système, il n’y a rien à attendre d’autre que des fruits pourris. Et travestir cette réalité est le triste rôle de tous les gouvernements réformistes.