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Dans le monde
Ukraine : corruption et salaires de misère
Dimanche 17 décembre, des manifestants hostiles au président ukrainien Porochenko ont tenté de rallier la place de la Liberté, à Kiev, pour dénoncer la corruption du pouvoir. Une corruption qui atteint des sommets – l’Ukraine figure parmi les pays les plus corrompus au monde – au point que le FMI (Fonds monétaire international) a récemment gelé le dernier prêt promis à Kiev tant que des mesures de lutte contre la corruption ne seraient pas prises.
Cela n’en prend pas la voie, car les organismes chargés de traquer la corruption en Ukraine n’ont pratiquement pas de personnel et leurs pouvoirs, dérisoires, viennent encore d’être rognés. Et quand ils engagent des poursuites, ils sont généralement dessaisis aussitôt.
Échaudé par le succès d’une manifestation qui avait vu défiler en centre-ville des milliers d’opposants dénonçant la corruption du pouvoir une semaine plus tôt, le gouvernement avait, le 16 décembre au soir, fait boucler préventivement le Maïdan par des hommes en armes de la Garde nationale.
On aurait pu se croire revenu début 2014, au temps du « mouvement du Maïdan », quand les autorités de l’époque avaient livré la rue aux exactions de leurs sbires, dans l’espoir de briser un mouvement de rejet massif d’un pouvoir corrompu. Finalement, le président d’alors, Yanoukovitch, avait été renversé, Porochenko et son équipe prenant sa place.
Aujourd’hui, Porochenko se voit reprocher les mêmes turpitudes que son prédécesseur. Du temps de ce dernier, il était déjà un magnat du monde des affaires. Depuis, il est devenu numéro 1 parmi les oligarques locaux, ces parasites qui, en Ukraine ou en Russie, ont amassé en peu de temps une richesse inouïe sur les ruines de l’économie soviétique, grâce à leurs appuis et à leur position dans l’appareil d’État.
Ainsi Porochenko, qui possède un empire industriel, facture la production de ses usines trois fois le prix habituel dès qu’il s’agit de commandes pour l’armée.
Chaque semaine apporte son lot de morts dans la guerre qui oppose Kiev et les paramilitaires de l’extrême droite nationaliste aux forces séparatistes soutenues par Moscou dans le Donbass. Porochenko et ses pareils, le haut encadrement de l’armée et les mercenaires qui pullulent des deux côtés, préfèrent que se poursuive une guerre où ils ont tant à gagner.
La population a eu ces jours-ci un aperçu de ce qu’elle lui coûte. La télévision a rapporté que des civils avaient péri brûlés vifs dans un camp de réfugiés où, par un froid glacial, ils se chauffaient comme ils pouvaient dans des abris délabrés fournis par les autorités.
Alors, comment ne pas avoir la nausée, quand on voit les gens au pouvoir poser en défenseurs de la population, tout en vivant dans des demeures de luxe à Kiev ? Ou quand ces dirigeants, au train de vie de parvenus de haut vol, se flattent d’avoir doublé le salaire minimum, qui reste misérable, sans dire que c’est sous la pression gréviste ?
De règle dans le textile et les secteurs à main-d’œuvre féminine, ce minimum n’atteint pas l’équivalent de 100 euros. Cela n’empêche pas le pouvoir de vouloir une réforme du Code du travail que Macron ne renierait pas.
Les autorités, leurs soutiens et les milieux d’affaires prétendent que le peu qu’il subsiste de la législation soviétique « surprotège les salariés et pénalise les employeurs » ! En tout cas pas les exploiteurs locaux, ni certains groupes financiers ouest-européens, français en particulier, qui produisent du blé et font leur blé en pressurant une main-d’œuvre de salariés agricoles sur les riches terres noires d’Ukraine.