cordée solidaire20/12/20172017Journal/medias/journalnumero/images/2017/12/2577.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

cordée solidaire

Dimanche 17 décembre, plus de 300 professionnels de la montagne (guides, accompagnateurs, pisteurs-secouristes, moniteurs de ski, etc.) ont formé une « cordée solidaire » partie de Névache, dans la vallée de La Clarée, près de Briançon dans les Hautes-Alpes, et ont fait la trace dans la neige (par moins 14°) jusqu’au col de l’Échelle pour exprimer leur complète solidarité avec les migrants et exprimer leur révolte contre les mesures prises par l’État à leur encontre.

Depuis plus d’un an, environ 1 600 migrants ont franchi l’Échelle. Parmi eux, 900 seraient mineurs. Majoritairement originaires d’Afrique de l’Ouest, ils suivent une route transmise par le bouche-à-oreille. Le passage par le sud de la France (frontière de Menton-Vintimille ou vallée de la Roya) étant de plus en plus difficile, leurs itinéraires se sont déplacés vers le nord et de hauts cols, peu connus et donc a priori peu contrôlés, comme celui de l’Échelle, à 1 762 m d’altitude.

De Turin, un train régional les dépose à la gare de Bardonecchia. À pied ensuite, ils traversent la frontière italo-française et partent à l’assaut du col. De jour comme de nuit. Cette toute petite route, sur le versant de la vallée Étroite menant à Bardonecchia, est carrément taillée dans la falaise et est donc non seulement complètement impraticable l’hiver (on l’appelle le « mauvais pas » !), mais soumise à tous les dangers de la haute montagne : avalanches de neige, de pierres, congères de glace vive, sans parler du froid avec des températures inférieures à -20° la nuit ! Ce sont ces dangers que les migrants affrontent, vêtus de simples vestes, chaussés de baskets ou de chaussures de ville, sans aucune connaissance des lieux !

Dans la nuit du 10 au 11 décembre, cinq mineurs, dont une femme enceinte, ont tenté de passer. Retrouvés par les secouristes italiens, ils ont été transportés jusqu’à l’hôpital de Suse. Deux d’entre eux présentaient d’importantes engelures aux membres. Et dimanche 10 décembre, lors de la « cordée solidaire », un secours a dû être déclenché vers midi par les organisateurs pour aller récupérer un jeune Africain qui tentait de passer le col de l’Échelle depuis l’Italie. Retrouvé pieds nus dans une pente très raide, il a dû être hélitreuillé pour être conduit au centre hospitalier de Briançon.

Bien des habitants de la région sont révoltés par cette situation. D’autant plus qu’à la détresse des migrants s’est ajoutée une présence accrue des forces de la gendarmerie et de la police aux frontières dont les contrôles sont omniprésents dans des vallées d’habitude quasiment coupées du monde. Certains disent même avoir vu l’armée effectuer des patrouilles en montagne. Ces contrôles visent tout autant les migrants, qui sont immédiatement reconduits aux bornes frontières en plein désert glacé, que les montagnards solidaires qui sont passibles de lourdes sanctions pénales simplement pour n’avoir pas laissé mourir des êtres humains !

Cela ne freine pas les actes de solidarité prenant toutes les formes : « maraudes » en haute montagne avec le sac à dos plein de Thermos remplies de boissons chaudes, approvisionnement des cabanes d’alpage en nourriture et couvertures, accueil d’urgence chez les habitants de la vallée de la Clarée, hébergement au centre d’accueil de Briançon.

Bon nombre des habitants des Hautes-Alpes vivent très chichement mais, contrairement aux politiciens, ils n’ignorent pas « toute la misère du monde » et ne veulent surtout pas laisser quiconque mourir de froid à leur porte.

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