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- Lutte ouvrière n°2547
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Dans les entreprises
Chantier naval STX – Saint-Nazaire : six semaines de protestations
Le 10 avril, une quarantaine d’ouvriers de l’atelier Panneau plan sont partis en débrayage et ont fait la tournée des ateliers, pour exprimer leur ras-le-bol face à une énième provocation de la direction.
Après des augmentations générales de 0,7 % cet hiver, c’est l’absence de versement de la prime d’intéressement qui a fait déborder le vase et conduit à réclamer une prime de livraison de navire.
Durant les six semaines qu’a duré le conflit, des débrayages de 59 minutes ont eu lieu tous les jours dans les trois équipes. L’habitude a été prise de se réunir tous les jours pour discuter des différentes actions et des points forts de la semaine. Assemblées générales, tournée des popotes (manifestations qui passent d’atelier en atelier), ont rythmé ce conflit.
Au bout de quatre semaines, les ateliers du sud ont décidé de manière très majoritaire de se mettre en grève totale. C’est donc plus d’une quarantaine de travailleurs qui ont cessé le travail, dans un secteur qui se trouve au début de la chaîne de production. Très vite, la direction a essayé de diviser en menaçant de mettre au chômage partiel les secteurs de production en aval. Mais la solidarité entre les différents secteurs a rendu sa menace inefficace et elle a finalement abandonné son projet.
Au cours des deux semaines suivantes, des équipes de différents secteurs ont cessé le travail, plusieurs jours de suite dans différents ateliers, à bord et dans un atelier qui fabrique les cabines des bateaux. Parallèlement, les débrayages quotidiens ont continué.
Tous les subterfuges possibles ont été employés par la direction, menaces de sanction, huissier, accusation de manipulation des grévistes par la CGT, menaces de chômage partiel. Elle a même essayé de demander aux chefs et aux cadres de faire redémarrer les machines. Des dizaines de tôles à plusieurs milliers d’euros pièce ont ainsi été gâchées, avant de réussir à en sortir quelques bonnes !
Rien de tout cela n’a entamé la solidarité, et tous les jours des travailleurs de secteurs différents sont venus exprimer leur solidarité avec le mouvement. La grève est cependant restée minoritaire, n’entraînant qu’une minorité des 800 ouvriers du chantier STX, et sans que les bureaux d’étude ne rejoignent le mouvement.
Les travailleurs des ateliers du sud ont finalement voté la fin de leur grève le vendredi 19 mai au matin. Un protocole de fin de conflit a été signé par la CGT, mandatée par les grévistes et seul syndicat à avoir soutenu le mouvement. Il comporte l’absence de poursuites disciplinaires et judiciaires, l’étalement des retraits pour jours de grève pour ceux qui le souhaitent et l’absence d’impact des jours de grève sur le 13e mois et sur les congés payés. La direction a également cédé à l’ensemble du personnel la restitution anticipée de cinq jours de RTT, qu’elle avait confisqués à la faveur d’un accord de compétitivité.
Bien sûr, les revendications des travailleurs en lutte n’ont pas été satisfaites, mais une direction qui clamait partout qu’elle n’avait pas un sou vaillant a trouvé comme par miracle deux millions d’euros pour rendre les RTT qu’elle avait volées.
De nombreuses démonstrations ont été faites, la plus précieuse étant que, sans le travail des salariés, tout s’arrête et que le géant se paralyse. Beaucoup de travailleurs ont pris conscience de leur force collective, de leur pouvoir d’organisation et de la puissance de la solidarité. Dans quelques équipes, les intérimaires ont participé aux débrayages, conscients que les différences de statut sont une barrière qu’il faudra dépasser si l’on veut gagner plus tard !