Uber : un patron reste un patron08/02/20172017Journal/medias/journalnumero/images/2017/02/2532.jpg.445x577_q85_box-0%2C62%2C822%2C1128_crop_detail.jpg

Leur société

Uber : un patron reste un patron

Le médiateur gouvernemental nommé pour tenter de calmer les chauffeurs mobilisés s’est contenté de faire des recommandations à Uber. Ceux-ci dénoncent l’hypocrisie d’un modèle économique qui repose, en fait, toujours sur l’exploitation de leur travail.

Le métier d’Uber est de connecter des clients avec des chauffeurs, et de se payer par une commission sur le prix des courses. En France ils sont 15 000 à travailler pour Uber, la plupart en tant qu’auto-entrepreneurs. Ce statut est souvent présenté par les dirigeants politiques comme un remède miracle au chômage. Car chacun deviendrait ainsi son propre patron. En fait, si les chauffeurs doivent acheter et entretenir eux-mêmes leur outil de travail (la voiture), et cotiser tout seuls aux caisses sociales et d’assurance, c’est bien Uber qui fixe les tarifs des courses et le montant de sa commission. Si le chauffeur refuse une course, il peut être déconnecté de l’application, ce qui revient à un licenciement de fait, par un simple clic. Le déplacement jusqu’au client et le temps d’attente ne sont pas payés.

Ces chauffeurs qui rêvaient d’indépendance se retrouvent en réalité enchaînés à l’entreprise. Ils doivent accumuler les heures pour s’en sortir. En moyenne, un chauffeur qui travaille 40 heures par semaine ne gagne au bout du mois que 500 euros net, après avoir payé sa commission à Uber. Pour gagner 1 300 euros net, il doit faire au moins 60 heures par semaine. 30 % des chauffeurs quittent d’ailleurs Uber chaque année, mais le chômage de masse assure un flux permanent de nouveaux candidats.

Quand Uber a fait passer sa commission de 20 à 25 % du prix des courses, en décembre 2016, les chauffeurs ont donc organisé des manifestations et des blocages d’aéroports pour revendiquer une augmentation de leurs tarifs, et une baisse de la commission Uber. Certains ont aussi déposé plainte, pour que la justice requalifie leur contrat commercial en contrat de travail, en leur accordant le statut de salarié, avec une protection sociale contre les accidents du travail et les maladies, des horaires encadrés, des congés payés et un salaire garanti.

Qu’ils soient chauffeurs, livreurs à vélo ou aides à domicile, ces travailleurs dits indépendants n’ont fait que changer la forme de leur exploitation. À l’ère du numérique, les auto-entrepreneurs connectés ont remplacé les chômeurs d’antan qui essayaient d’ouvrir une baraque à frites, mais l’impasse est la même

Que l’on soit salarié ou « indépendant », fonctionnaire ou dans le privé, en CDI ou en intérim, la seule chose qui peut limiter la rapacité des patrons est le rapport de force.

En s’organisant pour réagir face aux attaques de leur patron, les chauffeurs d’Uber montrent que la véritable nature de l’économie capitaliste est l’exploitation, et que son seul antidote reste les luttes collectives des travailleurs.

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