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Dans les entreprises
Condamnés pour avoir défendu leur emploi
Le tribunal de Bobigny a rendu son verdict contre quinze salariés ou ex-salariés d’Air France dans l’affaire de la chemise.
Il y a un plus d’un an, en octobre 2015, une réunion du CCE d’Air France à Roissy avait vu des milliers de salariés manifester contre l’annonce de 2 900 suppressions d’emplois, dont des licenciements secs. Deux de ses représentants ayant perdu leur chemise dans la mêlée, la direction d’Air France avait voulu faire un exemple. Cinq travailleurs avaient été arrêtés par la police dès le lendemain et licenciés dans la foulée, puis dix autres avaient été mis à pied sans salaire. Le patron, qui se veut maître chez lui, fait sa propre loi et rend une justice expéditive.
À l’ouverture de leur procès, ces quinze travailleurs déjà lourdement sanctionnés par l’employeur avaient entendu le président du tribunal déclarer qu’aucune vidéo des faits n’étant probante, leurs interprétations pouvaient être contradictoires. Cela n’a pas empêché le tribunal d’infliger 500 euros d’amende à dix d’entre eux et de deux à quatre mois de prison avec sursis à trois des licenciés. Quant aux deux autres licenciés, le tribunal les a relaxés. N’a-t-il pu trouver même un prétexte à les condamner ?
En tout cas, la direction a aussitôt fait savoir que cela ne changeait rien à sa décision de les licencier. Une nouvelle preuve qu’Air France, comme nombre de patrons, sait s’assoir sur les décisions de justice quand elles ne couvrent pas totalement son arbitraire.
En effet Air France ne tolère pas que des travailleurs aient pu refuser sa nouvelle charrette de suppressions d’emplois, et qu’ils se soient défendus contre ceux qui voulaient les priver de leur gagne-pain.
C’est pour la même raison que le gouvernement a mis sa police à la disposition de la direction et que Valls, venu lui apporter son soutien, a traité les salariés d’Air France de voyous. Des insultes reprises par la droite, le Front national, l’ensemble du patronat et la majorité des médias, qui ont fait front commun dans leur haine de classe contre des salariés défendant, non pas leur chemise, mais leur peau.
À Air France, ce verdict a écœuré nombre de travailleurs. Et cela, même si les directions syndicales n’ont, durant toute cette année, guère cherché à mobiliser le personnel pour défendre des salariés que la direction prenait en otages pour faire peur à tous. Des salariés dont la plupart, à commencer par les cinq licenciés, étaient d’ailleurs syndiqués à la CGT.
On ne sait pas encore si les quinze travailleurs directement visés, ou seulement certains, feront appel de leur condamnation. Quoi qu’il en soit, face à ce qui a tout d’une justice de classe, il faut l’annulation de toutes les sanctions et peines prononcées, et la réintégration des cinq licenciés !