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Trains fantômes : la SNCF deux fois condamnée
Le 18 octobre, le tribunal des prud’hommes de Bayonne a donné raison à trois cheminots qui avaient été sanctionnés par la SNCF pour avoir exercé leur droit de retrait et refusé de conduire des trains jugés dangereux. Deux jours plus tard, le tribunal correctionnel de Brest a condamné la SNCF pour homicide involontaire suite à un accident mortel à un passage à niveau, où le même type de train était impliqué.
Il s’agit des trains autorails de type X73500, qui présentent un problème récurrent de rupture de la liaison électrique entre le train et les rails. Ce phénomène appelé déshuntage, qui peut durer plusieurs minutes, peut avoir des conséquences très graves. Le train ne transmet plus aucune information par le courant électrique passant par les rails et ne donne donc plus sa position instant par instant. Il devient une sorte de train fantôme, avec le risque de percuter un train devant lui, ou bien de ne pas déclencher la fermeture des barrières d’un passage à niveau.
C’est probablement ce qui s’est passé à un passage à niveau situé près de Brest, en 2006, où une automobiliste a été fauchée par un train alors qu’elle s’y était engagée. D’après plusieurs témoins, les barrières ne se sont pas fermées à temps. Le tribunal l’a reconnu en condamnant la SNCF à verser 325 000 euros à la famille de la victime pour homicide involontaire.
Si la procédure a duré dix longues années, c’est parce que la SNCF a tout fait pour la ralentir, à coups d’expertises et de contre-expertises destinées à nier l’existence du déshuntage, et commençant même par présenter cet accident comme un suicide.
Dans le cas des cheminots refusant de conduire les trains de type X73500 sur la ligne Bordeaux-Bayonne, elle a eu une attitude tout aussi irresponsable. Ces cheminots ont exercé leur droit de retrait sur cette ligne parce qu’elle présente, selon eux, de forts risques de déshuntage. Alors qu’il y a eu plusieurs incidents sur cette ligne, que le problème se pose plus largement, dans différentes régions et depuis des années, qu’il est maintenant de notoriété publique, reconnu par le secrétaire d’État aux Transports lui-même, la SNCF a choisi de sanctionner les cheminots en leur infligeant un blâme assorti d’une retenue sur salaire.
Pour faire rouler ses trains coûte que coûte, la SNCF a convaincu certains cheminots de les conduire en leur promettant de satisfaire leurs demandes de mutation. Les cheminots sanctionnés ont porté l’affaire devant les Prud’hommes et ont déposé plainte contre elle pour mise en danger de la vie des salariés et des usagers, ce qui n’est que la stricte vérité, comme le prouve l’accident mortel de Brest. Mais cela n’a pas empêché la SNCF de persister dans son refus de reconnaître sa responsabilité et de faire appel du jugement des Prud’hommes.