Dès son arrivée aux affaires en décembre 2015, Macri a trouvé un compromis avec les fonds vautours, ces spéculateurs nord-américains cherchant à tirer profit de la dette du pays. Du coup, l’Argentine a retrouvé les bonnes grâces du FMI et l’accès à des lignes de crédit fermées depuis 2001.

Les grands propriétaires terriens de la Société rurale, le noyau historique de la bourgeoisie qui s’est enrichie dans l’élevage et aujourd’hui dans l’agroalimentaire, notamment grâce au soja, se frottent les mains. En 2008, ils avaient conduit une mobilisation contre la présidente péroniste Cristina Kirchner pour refuser des taxes à l’exportation. Au terme d’un long bras de fer, ils avaient eu gain de cause. En revanche, les entreprises qui depuis 2001 avaient développé des activités pour substituer certains produits qui n’étaient plus accessibles, faute de crédits internationaux, craignent maintenant d’être mises de côté.

La nouvelle équipe politique règle aussi ses comptes avec l’équipe précédente. Des dirigeants péronistes sont poursuivis pour corruption. La presse s’est fait l’écho de la mésaventure d’un ex-secrétaire d’État aux Travaux publics de Cristina Kirchner surpris dans un couvent où il tentait de cacher 160 sacs remplis de dollars, d’euros et de yens ! L’ex-présidente, elle aussi, est visée par une enquête pour enrichissement personnel. Ses comptes bancaires viennent d’être bloqués et ceux de ses enfants pourraient l’être.

L’enrichissement personnel est le sport favori des politiciens argentins, parmi d’autres. Bien avant que Nestor et Cristina Kirchner n’occupent tour à tour la présidence de 2003 à 2015, ils étaient connus pour s’être enrichis quand ils étaient à la tête d’une province bien pourvue en pétrole. Macri, lui-même héritier d’une grande fortune dont il serait intéressant de savoir comment elle s’est bâtie, a fait un cheval de bataille de la lutte contre la corruption, à la fois pour donner une image à son équipe, qui n’a pas encore eu le temps d’être rattrapée par des scandales, et pour donner une explication commode aux difficultés actuelles.

Macri a également pris le contre-pied de la politique des Kirchner vis-à-vis des classes populaires. Il s’est attaqué à l’emploi public et s’est lancé dans une opération vérité des prix de la consommation en gaz, électricité et eau. Il a tenté, par exemple, d’augmenter le gaz de... 900 %, déclenchant du même coup une riposte des classes populaires. Plusieurs journées de mobilisation l’ont obligé à rabattre ses prétentions. Le résultat de cette politique antiouvrière ne s’est pas fait attendre. La misère, qui avait sensiblement diminué dans la décennie précédente, est repartie à la hausse, touchant 40 % de la population. Et le travail au noir sans couverture sociale concerne désormais près de la moitié des 41 millions d’Argentins. Enfin, l’inflation reste forte.

Heureusement, les travailleurs et les classes populaires ne restent pas sans réactions et ripostent aux attaques. De quoi rendre le pays moins attractif pour les capitalistes en quête de profits faciles.