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- Lutte ouvrière n°2513
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Dans le monde
Italie : patron assassin
Un banal accident : c’est tout ce qu’a conclu le procureur de Piacenza, dans le nord de l’Italie, après que le 14 septembre un camion sortant des magasins GLS a renversé et tué un ouvrier qui participait à un rassemblement devant l’entreprise. La direction est responsable, car elle faisait pression pour inciter les camions à partir mais, pour les autorités, il n’y a là qu’un triste accident.
GLS est une des grandes entreprises de messagerie italiennes, dont le centre logistique se trouve à Piacenza, aux côtés des magasins des autres géants du secteur. Comme tous ses semblables, elle a recours pour ses opérations de manutention à des entreprises sous-traitantes, des « coopératives » qui emploient des travailleurs sous un faux statut d’« associés ».Cela revient en fait à leur dénier les droits les plus élémentaires. Les travailleurs de ces coopératives du secteur de la logistique, le plus souvent immigrés, sont sous-payés, subissent des horaires et des conditions de travail au bon vouloir de patrons qui eux-mêmes sont souvent membres de la Mafia et en appliquent les méthodes d’intimidation.
Mais, depuis quelques années, les ouvriers de ce secteur relèvent la tête et luttent pied à pied pour imposer la reconnaissance des droits, et notamment des minimums salariaux que les conventions collectives reconnaissent en principe aux salariés de ce secteur. Organisés dans de petits syndicats, dits « syndicats de base », nés en alternative aux grandes confédérations syndicales, ils ont, par leurs grèves et leurs manifestations, obligé les patrons à un certain nombre de concessions, mais le combat est toujours à recommencer, entreprise par entreprise. Gouvernement et médias, de leur côté, préfèrent faire silence sur l’existence en Italie de ces secteurs où, de la logistique à l’agriculture, des travailleurs sont employés dans des conditions proches de l’esclavage par des patrons qui considèrent que les ouvriers immigrés, arrivés après avoir risqué leur vie en traversant la Méditerranée sur des rafiots surchargés, doivent être prêts à accepter n’importe quoi.
Eh bien, il n’en est pas ainsi, et les travailleurs immigrés de la logistique montrent au contraire qu’après avoir vécu ces expériences, ce n’est pas un patron, même mafieux, qui peut leur faire peur. Ils montrent une combativité que les autres travailleurs, conditionnés par des années de reculs et souvent résignés, ne montrent plus.
À la GLS de Piacenza, les travailleurs étaient en lutte pour imposer à leur coopérative, la Seam, l’embauche effective de travailleurs précaires. C’est finalement ce que le patron de GLS a été contraint d’accepter, après que la mort de l’ouvrier a fait scandale. Malheureusement, comme l’ont dit les militants syndicaux après l’accord, cela ne rendra pas la vie à celui-ci, Abd Elsalem Ahmed Eldanf, ouvrier égyptien de 53 ans, père de cinq enfants et depuis treize ans en Italie, mort écrasé sous les roues d’un camion que son patron poussait à partir.