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Dans les entreprises
Des militants américains de Nissan face à Ghosn
À toucher le salaire de PDG de Nissan en plus de celui de Renault – 16,5 millions d’euros pour l’année, excusez du peu – Carlos Ghosn récolte aussi quelques désagréments. Il a ainsi été interpellé, le 28 juin, lors du comité de groupe à Boulogne-Billancourt, par des militants syndicaux américain de l’United Auto Workers, l’UAW.
Depuis 2003 en effet la direction de l’usine Nissan de Canton, dans le Mississipi, combat par tous les moyens l’installation d’un syndicat parmi les 6 000 travailleurs. Chantage à l’emploi et à la délocalisation de la production au Mexique, menaces en tout genre, licenciements de salariés combatifs, réunions obligatoires de désinformation sur les catastrophes encourues par les ouvriers s’ils se syndiquaient, vidéos diffusant en permanence la bonne parole patronale : tel est le quotidien que décrivent ceux qui cherchent à monter un syndicat chez Nissan-Canton, un militant de l’UAW comparant le patron à Big Brother.
La direction se préserve ainsi d’avoir à participer à des négociations collectives, alors que les conditions de travail sont déplorables. Les ouvriers doivent parfois tenir trois ou quatre postes différents, l’absence de climatisation dans le climat du sud des États-Unis a provoqué des évanouissements, les accidents du travail graves ne sont pas rares.
Ghosn, en visite à l’usine de Canton en janvier 2014, avait réclamé le port de vêtements image de marque. Il n’avait apparemment pas apprécié les T-shirts de certains ouvriers et ouvrières, qui portaient imprimé « Tell Nissan : labor rights are civil rights. » Autrement dit : « Dites à Nissan que les droits des travailleurs sont des droits civiques ». L’allusion aux manifestations des années 1960 contre la discrimination raciale était transparente. D’autant plus que, dans l’usine de Canton, ville parmi les plus pauvres de l’État du Mississipi, 80 % des ouvriers de production sont noirs. Nissan, à l’instar d’autres constructeurs automobiles non américains, n’a en effet pas choisi par hasard d’installer des usines dans ces États du Sud où les droits syndicaux sont restreints. Ghosn ne l’ignore nullement. Il avait répondu à une précédente interpellation sur le sujet que les dirigeants de Nissan-Canton respectaient les droits en vigueur.
Quant au gouvernement français, actionnaire à 19 % de Renault qui lui-même possède 43 % de Nissan, il ne fait guère entendre sa voix. Aurait-il déjà assez à faire avec les militants syndicaux de ce côté de l’Atlantique ?