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Syrie : vers un retrait des troupes russes ?
À la surprise générale, ou au moins à la surprise des commentateurs, Vladimir Poutine a annoncé lundi 14 mars le début du retrait de la majeure partie des troupes russes stationnées en Syrie. Il ne s’agit pas d’un retrait total. L’armée russe aura toujours au moins un site de maintenance, « pour permettre la surveillance de la trêve des combats », dit-elle. Et un responsable militaire russe en Syrie a confirmé que l’aviation continuerait ses frappes contre des « objectifs terroristes ».
Cinq mois après le début de son intervention, l’armée russe a aidé le pouvoir de Bachar al-Assad à se remettre en selle, en bombardant les régions dominées par l’opposition : de Daech à l’Armée syrienne libre en passant par toutes sortes de milices djihadistes. Malgré les déclarations hypocrites des dirigeants des grandes puissances, l’intervention russe non seulement ne les a pas gênés mais les a même tirés d’un mauvais pas.
En effet, après avoir tenté dans un premier temps d’utiliser les milices djihadistes pour abattre le régime d’Assad, les dirigeants impérialistes ont constaté qu’ils ne maîtrisaient plus rien et que le chaos engendré par ces milices se retournait contre eux. Ils se sont alors orientés vers la recherche d’une solution politique, non pas contre le régime d’Assad mais en s’appuyant sur lui et ses alliés, l’Iran, les milices du Hezbollah libanais, mais aussi les milices kurdes. L’intervention russe est allée dans leur sens.
Mais cette intervention, en renforçant les alliés d’Assad et en affaiblissant ses opposants, a modifié le rapport des forces et a pris à rebrousse-poil les puissances régionales comme la Turquie et l’Arabie saoudite, qui avaient combattu Assad et soutenu les milices djihadistes. Cela a aussi entraîné de nouvelles tensions, notamment entre la Turquie et la Russie, ou encore entre l’Iran et l’Arabie saoudite, puissances rivales de longue date.
Depuis le 27 février, sous la pression des États-Unis, une trêve a cependant été décrétée entre les forces fidèles à Assad et l’opposition. Des négociations sont censées avoir lieu à Genève. Il est possible que l’annonce de Poutine soit un geste d’apaisement vis-à-vis de la Turquie et de l’Arabie saoudite, pour aider à l’ouverture de ces négociations, dans une situation où le régime d’Assad, allié de la Russie, est en relative position de force. D’autant plus que cette trêve a aidé à geler les velléités d’intervention militaire directe en Syrie dont menaçaient l’Arabie saoudite et ses alliés.
Une véritable fin de la guerre en Syrie est encore très loin. Les rivalités entre les puissances régionales et internationales se sont multipliées et amplifiées, et une étincelle peut mettre le feu aux poudres. L’annonce de Poutine, dont on ne sait pas par quoi elle se traduira concrètement, n’y change pas grand-chose. Quant à la population syrienne, elle reste prise au piège. Entre la férocité du pouvoir de Bachar al-Assad, la barbarie des intégristes de Daech et des autres djihadistes, et les destructions dues aux innombrables bombardements, ceux qui n’ont pas pu fuir continueront pour longtemps à vivre un véritable enfer.