Patronat et politiciens calaisiens à la manœuvre09/03/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/03/2484.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Patronat et politiciens calaisiens à la manœuvre

Le 7 mars, a eu lieu à Paris une manifestation, en majorité des commerçants et des petits patrons calaisiens, pour demander au gouvernement que leur ville soit reconnue « en état de catastrophe économique exceptionnelle » en raison de la présence des migrants.

Organisée par le Grand rassemblement du Calaisis, une association lancée par le patronat local, cette manifestation a rassemblé 500 personnes, arborant des drapeaux tricolores, des teeshirts I love Calais et des pancartes évoquant les discours de De Gaulle pendant la Deuxième Guerre mondiale : « Calais outragé... Calais brisé... Calais martyrisé ».

Les délégués, reçus par le gouvernement, ont demandé une exonération des charges salariales et patronales, de la taxe professionnelle, et un moratoire fiscal. Le mercredi précédent, Natacha Bouchart, la maire (LR) de Calais, accompagnée de Xavier Bertrand, président (LR) de la région, avait exprimé la même revendication lors de leur entrevue avec Hollande.

Derrière ce défilé, il y a une manœuvre politique du patronat local, en particulier du patronat du port incarné par Jean-Marc Puissesseau, ex-président de la CCI (chambre de l’industrie et du commerce) et PDG de la nouvelle Société d’exploitation des ports du détroit, pour tenter de mobiliser derrière lui non seulement les restaurateurs et autres petits commerçants du tourisme et des loisirs, mais aussi la population calaisienne et en particulier les syndicats de salariés.

Mais si quelqu’un ravage la ville et la région depuis des décennies, ce ne sont pas les migrants, c’est le patronat, en détruisant systématiquement les emplois. Les patrons dentelliers, en fermant leurs usines, n’ont pas perdu leurs capitaux mais les ont investis dans des secteurs plus rentables. Les filiales de multinationales richissimes, Schaeffler ou Alcatel, ont multiplié les suppressions d’emplois, tout en empochant les subventions publiques (ce qui n’a pas empêché Tioxide de fermer). Les requins du transmanche, DFDS, Eurotunnel, P&O, eux, se sont livré bataille aux dépens des marins, pour réaliser des profits record. Quant à la liquidation des petits commerces, elle est due essentiellement à la concurrence de la grande distribution et à la baisse du pouvoir d’achat des classes populaires.

Alors, parler de Calais comme d’une ville à la dérive à cause des migrants, c’est dédouaner les vrais responsables : les patrons qui ont licencié des dizaines de milliers de travailleurs. C’est eux qui ont semé la misère dans cette ville ouvrière où les chômeurs ne trouvent pas d’emploi, où les salariés s’épuisent tous les jours au travail pour des salaires insuffisants, où beaucoup n’ont pas assez d’argent pour vivre correctement.

Le patronal local, pleurnichant par la voix de la CCI et des patrons du port et du transmanche, ose appeler à s’unir et à manifester derrière lui, pour prétendument « sauver la ville, sauver le port ». Mais c’est sauver leurs profits qu’ils veulent ! Le patronat réclame encore des subventions, des cadeaux, que les travailleurs épongeront encore par des hausses d’impôts. Il cherche aussi le consensus des forces politiques et syndicales pour qu’elles s’alignent derrière lui.

Il n’y a pas à marcher dans cette combine. Il n’y a pas à soutenir ceux qui ont licencié les dockers, les marins, tout fait pour détruire leurs syndicats, et qui sont prêts à continuer demain. Si le monde du travail a besoin d’unité, ce n’est sûrement pas à la remorque des patrons, c’est contre eux, pour les contraindre à prendre sur les profits pour créer des emplois et augmenter les salaires.

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