Italie : banques sauvées, petits épargnants coulés03/02/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/02/2479.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : banques sauvées, petits épargnants coulés

Après plusieurs manifestations, les petits épargnants ruinés par le naufrage de quatre banques de la région Toscane, se sont à nouveau retrouvés pour manifester leur colère dimanche 31 janvier. Sur leurs pancartes, on pouvait lire : « Les petits fraudeurs vont aux galères, les gros partent en croisière », ou encore « Où est passé l’argent que les banques nous ont pris ? », mais aussi des slogans contre le gouvernement Renzi et son décret « Salva banche », littéralement « sauvetage des banques ».

Entré en vigueur le 22 novembre 2015, ce décret porte bien son nom : il s’agit en effet de sauver quatre banques menacées de faillite après avoir spéculé et accumulé des créances douteuses. Renzi a bataillé avec l’Union européenne pour faire accepter son décret, qui autorise ces banques à placer les crédits douteux – c’est-à-dire risquant de n’être jamais remboursés – dans une structure financière spéciale qui leur permettra de s’en débarrasser petit à petit, avec le soutien de l’État bien sûr.

En réalité, ceux qui se sont retrouvés ruinés du jour au lendemain sont d’abord et avant tout les petits épargnants, ceux qui n’étaient pas suffisamment bien renseignés pour retirer leurs fonds à temps, ceux qui avaient fait confiance à leur banque « régionale » qui leur assurait qu’elle plaçait leurs économies sur des produits « sûrs et peu spéculatifs ». Parmi eux se trouvaient une majorité de retraités, des petits-bourgeois, commerçants, artisans, mais aussi des travailleurs arrivés à l’âge de la retraite, ayant placé toutes leurs économies, et notamment la « liquidazione », l’indemnité de fin de contrat en vigueur en Italie, dans des créances qui se sont avérées tellement spéculatives et douteuses qu’elles sont appelées « sofferenze » (souffrances) en italien…

D’après les associations de consommateurs – qui reprochent aux banques et à la banque centrale italienne de n’avoir pas joué leur rôle en taisant les risques et en n’informant pas les clients – près de 130 000 épargnants pourraient être touchés.

L’affaire fait du bruit depuis fin novembre et le suicide d’un retraité de Civitavecchia, après la perte de toutes ses économies investies par l’une des quatre banques toscanes, la Banque Etruria. À la perte de confiance envers les banques et le gouvernement s’ajoute le dégoût provoqué par les collusions évidentes entre responsables politiques et dirigeants du monde financier. La ministre des Réformes constitutionnelles du gouvernement Renzi, Maria Elena Boschi, n’a convaincu personne lorsqu’elle a tenté de faire croire que son père, vice-président de la banque Etruria, n’était qu’un subalterne de bonne foi, d’ailleurs depuis peu au conseil d’administration, alors qu’il y siège depuis cinq ans et a été promu justement au moment où sa fille devenait ministre. Sans parler de son implication dans des affaires louches allant de l’évasion fiscale aux relations mafieuses.

Dupés et ruinés, ces petits épargnants, courtisés par le Mouvement 5 étoiles de Grillo comme par la Ligue de Salvini, admirateur italien de Marine Le Pen, réclament que les banques leur rendent leur argent. Ils sont victimes d’un système capitaliste à bout de souffle, asphyxié par sa propre financiarisation. Ils sont non seulement exploités mais carrément spoliés par des mafias en tout genre, dont celle des banques, alliées du pouvoir, n’est pas la dernière.

Seule la classe ouvrière qui, elle aussi, subit les attaques du gouvernement serait en mesure d’ouvrir des perspectives politiques, y compris à ces petits épargnants en colère, contre la classe capitaliste, ennemi commun servi par la politique de Renzi.

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