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- Lutte ouvrière n°2476
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Editorial
Déclarer l’état d’urgence contre la politique patronale de Hollande
Un plan d’urgence pour l’emploi : voilà comment patronat et gouvernement veulent encore nous berner, au prétexte de lutter contre le chômage. Cela fait plus de trois ans que le gouvernement nous mène en bateau. En 2013, promis-juré, les affaires allaient reprendre et la courbe du chômage s’inverser.
En 2014, grâce au crédit d’impôt compétitivité et au pacte de responsabilité, synonymes de 50 milliards d’allégements de cotisations et d’impôts pour les entreprises, le gouvernement et le patronat garantissaient la création d’un million d’emplois. Pour l’occasion, le Medef avait même réalisé des Pin’s « 1 million d’emplois ».
En 2015, le gouvernement nous annonçait la reprise. Tels madame Irma, tous les ministres voyaient un parfait alignement des planètes, avec des taux d’intérêt historiquement bas, un euro plus faible et un pétrole en baisse. Et puis, avec la loi Macron, le travail du dimanche et la déréglementation d’activités, forcément, des emplois seraient créés…
Le bilan de toutes de ces années de « lutte » contre le chômage s’élève à un million… de chômeurs supplémentaires ! Depuis que Hollande est élu, Pôle emploi enregistre 670 000 chômeurs de plus en catégorie A, sans aucun travail, fût-ce à temps partiel, et 1,12 million de plus si on inclut ceux qui ont eu une activité réduite dans le mois.
Et voilà qu’Hollande nous fait le coup de l’état d’urgence économique et sociale !
Pour les plus de 6 millions de femmes et d’hommes qui doivent se débrouiller pour vivre sans emploi, c’est une urgence quotidienne. C’est une urgence vitale pour des centaines de milliers de jeunes condamnés à l’inactivité et à la précarité. Pour les licenciés de plus de 50 ans, certains de rester sur la touche s’ils ne retrouvent pas un emploi très vite, oui, chaque jour compte.
Mais Hollande n’a rien à faire de cette urgence-là. Ce n’est pas son monde. Il ne détermine pas sa politique pour répondre à l’urgence et aux besoins des chômeurs ou des salariés. Il définit sa politique pour répondre aux exigences du patronat, pour faciliter leurs affaires et leurs profits.
Quant au patronat, le chômage l’arrange bien. Il lui permet de faire le chantage au coût du travail, à la compétitivité et à la délocalisation, tout en bénéficiant de la politique de lutte contre le chômage qui consiste à arroser les entreprises à coups de milliards et à liquider les droits sociaux. Et cela va continuer.
Hollande a donné les grandes lignes du plan qu’il présentera le 18 janvier. Le patronat, qui réclame de payer toujours moins la main-d’œuvre, y est déjà bien servi puisqu’une nouvelle prime de 1 000 à 2 000 euros serait accordée à chaque embauche dans les très petites entreprises.
À côté de cela, il promet – encore et toujours – de relancer l’apprentissage et il serait prêt à mettre un milliard sur la table pour la formation de 500 000 chômeurs dans les métiers dits d’avenir ou en tension.
Envoyer des milliers de chômeurs en formation pour les sortir des chiffres du chômage permettra peut-être d’inverser la courbe sur le papier, et à Hollande de se présenter pour 2017, mais ce n’est pas cela qui créera de vrais emplois.
Et puis, il y aura la loi de la ministre du Travail, El Khomri, censée réécrire le Code du travail pour faciliter la tâche des patrons. CDI, 35 heures, indemnités prud’homales, exonérations de cotisations sociales : le patronat pousse pour remettre tous les droits des salariés en cause. Pourquoi se gênerait-il quand le gouvernement a, jusqu’à présent, satisfait toutes ses exigences ?
Les voilà donc repartis pour une campagne d’intox sur « les freins à l’embauche » et « la peur du patronat d’embaucher ». Et pendant ce temps, tous les grands groupes continueront de planifier des suppressions d’emplois, comme chez Air France, à la SNCF ou dans l’automobile.
Sans que cela fasse la une de l’actualité, les licenciements se poursuivent. C’est le cas du groupe Pentair, qui veut fermer son usine à Ham dans la Somme avec 130 licenciements à la clé, d’Avenir telecom qui a planifié la fermeture de 60 agences et 260 licenciements, du groupe Tetra qui veut licencier 111 salariés au Havre-Octeville-sur-Mer. Et combien d’autres dans le pays ?
Un véritable plan d’urgence imposerait d’arrêter cette hémorragie et d’interdire à tous ces groupes de licencier. Il imposerait la répartition du travail entre tous les salariés sans baisse de salaire, à commencer par l’embauche immédiate des intérimaires et CDD. Mais, pour cela, il faudrait déclarer l’état d’urgence contre la rapacité patronale dont le gouvernement est complice.
Éditorial des bulletins d’entreprise du 11 janvier 2016