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États-Unis : des contrats dans l’automobile qui passent mal
Décidément l’UAW, le syndicat des travailleurs de l’automobile américain, a bien du mal à convaincre ses membres que les contrats qu’il a négociés pour les quatre prochaines années avec les patrons des trois principaux constructeurs sont de bons contrats. En fait ils déçoivent tous ceux qui ont cru que le retour des profits pour les patrons aurait signifié la fin des sacrifices pour les travailleurs et la compensation de ceux passés, comme l’avait démagogiquement laissé entendre le dirigeant de l’UAW Denis Williams.
Mais le syndicat a dû s’y reprendre à deux fois pour obtenir un vote favorable des ouvriers de Chrysler, qui dans un premier temps avaient massivement rejeté le contrat.
Pour tenter de couper court au mécontentement, le contrat proposé chez General Motors double la prime accordée une fois le contrat signé. Elle est passée à 8 000 dollars contre 3 à 4 000 dollars chez Chrysler, mais cela n’a pas suffi à ce que les 8 500 travailleurs qualifiés votent pour ce contrat, qu’ils ont refusé à près de 60 %. Ces travailleurs étant une minorité, c’est finalement une majorité de oui qui se dégage sur l’ensemble de l’entreprise, mais le refus des travailleurs qualifiés bloque la ratification.
Les dirigeants syndicaux se sont donné une semaine pour organiser des réunions avec ces travailleurs et déterminer pourquoi ils ont rejeté le contrat. Ils peuvent passer outre leur opposition si celle-ci n’est pas fondée sur des problèmes spécifiques mais sur des questions générales. C’est ainsi qu’ils ont déjà passé outre l’opposition des ouvriers qualifiés deux fois dans le passé, en 2011 chez Chrysler et en 1973 chez Ford.
Ils s’apprêtent à refaire la même manœuvre.
Mais ce sont maintenant les travailleurs de Ford qui sont appelés à voter sur leur propre contrat. Vendredi 6 novembre, le jour où le vote chez GM se terminait, l’UAW a annoncé la fin des négociations chez Ford. Cette fois la prime de signature a été encore un peu augmentée, passant à 8 500 dollars, auxquels Ford ajouterait le versement anticipé d’une prime de résultat de 1 500 dollars pour allécher les travailleurs. Mais le contrat de Ford est sur le même modèle que les deux autres et n’est satisfaisant ni sur les salaires, après dix ans de gel, ni sur les conditions de travail éreintantes, ni sur les emplois. Le fossé entre les conditions des nouveaux embauchés au salaire réduit de moitié et les anciens ne peut être comblé qu’après huit années d’ancienneté. C’est dire que les deux statuts vont continuer à coexister, d’autant plus que, sous prétexte que les nouveaux embauchés peuvent au bout de huit ans retrouver le niveau de salaire des anciens, il n’y a plus de quota maximum fixé pour l’embauche de travailleurs sous-payés !
Le syndicat utilise la menace de la grève, non pas contre les patrons, mais contre les travailleurs pour les pousser à signer. Le journal The Spark de l’organisation trotskyste américaine du même nom explique ainsi la situation : « Il est évident que des dizaines de milliers de travailleurs chez GM et Chrysler n’ont aucune confiance dans la direction nationale du syndicat pour la suivre dans une lutte contre le patronat – une direction qui menace d’obtenir encore moins, et non pas plus, si les travailleurs se battent !
Les travailleurs de Ford [...] sont les derniers à voter précisément parce que la compagnie et le syndicat savent que ces travailleurs sont capables d’exiger plus et sont plus difficiles à tromper. Ils n’ont pas oublié l’opposition organisée des travailleurs de Ford au contrat de 2009. Le vote non était tellement nombreux et déterminé que le syndicat n’avait pas même osé proposer un deuxième vote. »
Refuser les sacrifices mais aussi se donner une organisation et des dirigeants vraiment fiables, c’est là le défi posé aux travailleurs de l’automobile comme à toute la classe ouvrière.