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OCDE : très chère fraude fiscale
L’OCDE, qui regroupe les pays les plus riches, vient de s’entendre sur un ensemble de mesures supposées freiner l’évasion fiscale que pratiquent à grande échelle les banques et multinationales, flouant ainsi de centaines de milliards d’euros les finances publiques des États de la planète.
Pascal Saint-Amans, directeur à l’OCDE, reconnaît ainsi « l’ampleur du problème résultant des failles et chevauchements existants entre les différents systèmes fiscaux de pays qui sont utilisés par les multinationales pour faire disparaître les bénéfices ou les déplacer de manière artificielle vers les paradis fiscaux ». En effet les grandes entreprises possèdent des filiales dans de nombreux pays et placent les bénéfices là où ils sont le moins taxés.
Ainsi plus du tiers des filiales des banques françaises sont domiciliées dans des paradis fiscaux : BNP en possède ainsi 170, la Société Générale 139, le Crédit Agricole 133, etc. Les entreprises de l’économie numérique sont souvent à l’avant-garde de ces fraudes, avantagées par leur activité qui est en partie dématérialisée. En 2014 ebay, site de vente aux enchères, a réalisé un chiffre d’affaires de 6,7 milliards d’euros en France, tout en se débrouillant pour ne payer au fisc français que 74 717 euros d’impôts sur les sociétés ! Facebook, qui compte quelque 20 millions d’utilisateurs en France et qui a déclaré 12,9 milliards de chiffre d’affaires, ne s’y est acquitté que de 319 167 euros d’impôt sur les bénéfices l’an dernier.
Une récente étude basée sur les documents financiers déposés par les entreprises elles-mêmes auprès du gendarme de la Bourse de Wall Street révèle qu’au moins 358 des 500 plus grosses entreprises américaines ont des filiales dans des paradis fiscaux, y abritant des sommes colossales. Ainsi Apple détient 181 milliards de dollars à l’abri du fisc américain, General Electric 119 milliards, Microsoft 108 milliards, etc. En tout 2 100 milliards de profits sont placés à l’étranger, permettant à ces multinationales d’éviter de payer 620 milliards de dollars d’impôts, rien qu’à l’État américain.
D’un côté les États, endettés jusqu’au cou, aimeraient récupérer une partie de ces sommes. De l’autre cette fraude n’est possible que parce que ces mêmes États, et leurs émanations internationales comme l’OCDE, servent la bourgeoisie et lui facilitent les transferts financiers de toutes sortes, y compris à leur propre détriment.
Même si elle est un peu retouchée, la politique fiscale des États les plus puissants ne contraindra certainement pas les multinationales à payer leurs impôts avec la rigueur habituellement utilisée pour y contraindre le simple contribuable. Saint-Amans le reconnaît d’ailleurs en déclarant que cette politique « ne veut pas pour autant dire qu’il n’y aura plus d’évasion fiscale ».
D’ailleurs l’OCDE a tendance à minimiser l’ampleur de cette fraude. Officiellement, elle ne parle que de 100 à 240 milliards de dollars qui échapperaient chaque année aux services fiscaux des États. Ce montant est de toute évidence grossièrement minimisé.
Les fraudeurs de la grande bourgeoisie n’ont donc pas grand-chose à craindre du sommet du G20 qui se tient ces jours-ci. Il adoptera peut-être les recommandations de l’OCDE, avec d’autant plus de mousse médiatique qu’elles auront peu effet.