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Dans le monde
Grèce : démission de Tsipras, une tactique électorale
Tsipras a démissionné de son poste de Premier ministre, ouvrant ainsi la voie à des élections anticipées. C’est une décision tactique et politique. Largement inévitable, vu la défection d’une trentaine de députés de son parti Syriza, qui lui interdisait d’espérer une majorité lors d’un vote de confiance, elle lui permettra peut-être de régler certains de ses problèmes, mais elle n’ouvre aucune perspective aux travailleurs ni à la population dans son ensemble.
Le 20 août, Tsipras a donc déclaré à la télévision que son mandat était arrivé « à ses limites », qu’il avait certes fait des compromis difficiles mais obtenu « des exigences inférieures à celles de l’accord précédent », qu’il fallait respecter cet accord mais aussi « se battre pour en réduire les effets nocifs ». Il a ajouté qu’il était de sa « responsabilité morale (…) de remettre au jugement des électeurs ses réussites comme ses échecs » et il a conclu : « Je suis fier de ma bataille et de mon gouvernement. »
Soudaineté de l’annonce, appel à la volonté du peuple : la méthode rappelle celle utilisée pour appeler au référendum contre le plan d’austérité au début juillet. Cette fois-ci, elle lui permet de prendre le pas non seulement sur les partis traditionnels mais aussi sur son opposition interne, qui s’amplifiait au fil des votes sur les mesures d’austérité.
Tsipras n’a jamais caché qu’il cherchait à remédier à la situation économique du pays par le compromis, en respectant les règles du marché et des créanciers. Ces derniers ont exercé des pressions constantes et ont finalement imposé leurs exigences. Après la signature du troisième plan, il faut passer aux applications. Pour cela, Tsipras a besoin d’une certaine stabilité et de mettre le holà aux débats et aux contestations.
Les élections, prévues autour du 20 septembre, pourront-elles lui donner la marge de manœuvre dont il a besoin ?
Tsipras trouvera face à lui les partis traditionnels, la Nouvelle démocratie et le Pasok, qui ont laissé de très mauvais souvenirs à la population. C’est d’ailleurs aussi pour se débarrasser de ces politiciens corrompus qu’une partie des électeurs ont voté Syriza, sans trop d’illusions.
Quant à Lafazanis, le dirigeant de l’opposition de gauche dans Syriza, après avoir regroupé vingt-cinq députés sous l’étiquette Unité populaire, en vue des prochaines élections, il tente lui aussi son opération politique et a annoncé la création d’un « grand front anti-mémorandum », « un front puissant de patriotisme (…), de démocratie et de reconstruction du pays », reprenant des discours semblables à ceux des dirigeants de Syriza avant leur arrivée au pouvoir. Pas plus que Tsipras, il ne représente une politique prenant en compte les intérêts des travailleurs.
Tsipras cherche à s’appuyer sur la volonté populaire, à conforter une légitimité personnelle qui lui permette d’être, dans une certaine mesure, au-dessus des aléas parlementaires et des querelles de partis. Il veut le faire sans tarder, puisque les sondages lui accordent encore une bonne cote de popularité, qui risque de diminuer avec le temps et l’entrée en vigueur des nouvelles mesures d’austérité.
Le résultat du scrutin changera peut-être sa marge de manœuvre au Parlement, mais pas la nature des mesures à imposer à la population.
Les créanciers internationaux ont amplement prouvé leur acharnement et leur mépris pour le gouvernement et la population grecs. Ils ne veulent aucun obstacle à leur volonté. Ce qui leur importe, c’est de faire payer les travailleurs, la population pauvre. Et ce ne sont pas des élections, quel que soit le résultat, qui les feront reculer.