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SNCF et canicule : j’ai le rail qui se dilate…
Avec l’épisode de canicule, de nombreux incidents ont émaillé les transports voyageurs. Ainsi, un train Orléans-Paris est tombé en panne 500 m après son départ. Un voyageur a raconté le calvaire : « Le train était en panne, sans climatisation, mais nous avions interdiction de sortir. On est restés pendant deux heures en plein soleil, avec 50 degrés dans les wagons. Des gens ont commencé à faire des malaises. »
Mais l’Île-de-France a sans doute connu le plus d’incidents, avec une interruption du trafic pendant plusieurs heures à la gare Saint-Lazare et à la gare du Nord, des trains immobilisés, des quais bondés, des voyageurs sur les voies. Les conditions de transport, déjà dégradées habituellement, ont été intenables pour des centaines de milliers de voyageurs.
Pepy, le président de la SNCF, a expliqué que les températures record depuis soixante-dix ans étaient à l’origine de ces incidents. Effectivement, les rails ont atteint une température de 45°C, entraînant leur dilatation et l’obligation pour les conducteurs de ralentir fortement. Suivant le même processus, des caténaires, câbles suspendus chargés de l’alimentation des trains électriques, se sont détendues et ont pu être arrachées par le passage d’un train.
Mais, si les températures exceptionnelles sont effectivement en cause, elles n’ont pu entraîner autant de pannes et d’incidents qu’en raison de l’état de vétusté incroyable du réseau, particulièrement en Île-de-France.
Dans cette région, 44 % des actifs vont au travail en transport en commun. Rien que le trafic du RER B est supérieur au trafic de l’ensemble des TER en France, et le trafic du RER A est trois fois plus important que celui de tous les TGV. Et le trafic Transilien a progressé de 30 % en dix ans. Mais, alors que le réseau est très dense et très fréquenté, il a été littéralement laissé à l’abandon pendant trois décennies.
Aujourd’hui, d’après les chiffres mêmes de la direction cités par une étude du cabinet Degest, 50 % du réseau et des appareils de voies ont plus de trente-cinq ans d’âge. Certaines caténaires de la ligne C ont plus de quatre-vingt-dix ans. Sur la ligne D, l’immense majorité des installations caténaires ont entre soixante et soixante-dix ans. Certains postes d’aiguillage datent d’avant 1938. En dehors de toute canicule, 16 000 incidents annuels ont lieu en raison de l’obsolescence de la signalisation.
L’état de dégénérescence du réseau, voies et matériels, a été pointé depuis longtemps par les cheminots de l’Infrastructure, dont les effectifs ont aussi été laminés. Il a fallu un rapport alarmiste de polytechniciens de Lausanne pour que RFF et la SNCF se décident à des travaux d’entretien et des investissements de régénération, trop limités.
Un réseau saturé et hors d’âge, voilà ce qui explique la multiplication des pannes dès que le thermomètre s’affole.