La dette : une machine à saigner le peuple grec08/07/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/07/2449.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

La dette : une machine à saigner le peuple grec

La Grèce totalise 314 milliards de dettes et ses banques disposent en tout et pour tout de 500 millions d’euros de liquidités, soit 50 euros par habitant. Sauf perfusion de la BCE, elles ne pourront rouvrir sans risquer la faillite. Comment la Grèce en est-elle arrivée là ?

Les uns dénoncent la mauvaise gestion des dirigeants grecs, voire leurs mensonges. D’autres évoquent les dysfonctionnements de l’État, son incapacité à faire rentrer les impôts et la très faible compétitivité du pays. Quoi qu’il en soit, les Grecs seraient responsables de leur malheur. Mais le malheur de la Grèce est d’être un pays pauvre pris dans les griffes de la finance. Et plus elle se débat, plus l’étau se resserre.

La dette grecque s’est emballée à la suite de la crise de 2008 sous l’effet d’un double phénomène. Comme tous les pays, la Grèce s’est endettée pour sauver son système financier et renflouer les banques. Mais surtout, elle a été fortement incitée à emprunter par les banquiers eux-mêmes. Dans ces années de chaos, les emprunts d’État sont en effet devenus les principaux débouchés de la finance et les États, ses meilleurs clients. La Grèce, même pauvre et endettée, ne faisait pas exception. C’est ainsi que les financiers mirent des milliards à sa disposition, comme ils en mirent à la disposition de la France et de l’Allemagne. Ils avaient de l’argent à gagner sur la dette grecque et, tant que le pays payait les intérêts, ils se moquaient bien de sa solvabilité.

En 2010, l’ampleur de la dette grecque et son insolvabilité furent révélées au grand jour. Les financiers ne prêtèrent plus à la Grèce qu’à des taux d’intérêt prohibitifs. Ce fut l’engrenage du surendettement. Alors que l’Allemagne pouvait emprunter à 3 % sur dix ans, la Grèce devait payer 18 %, jusqu’à ne plus pouvoir se refinancer du tout. La crise grecque menaça alors d’entraîner dans sa chute les banques européennes engagées dans le pays. C’est alors qu’il y eut les prétendus « plans d’aide à la Grèce ».

Entre 2010 et 2013, 207 milliards d’euros ont été prêtés à la Grèce par les institutions européennes. Comme le dit Joseph Stigliz, prix Nobel d’économie, « seule une très faible partie des énormes sommes d’argent prêtées à la Grèce lui était réellement destinée. Elles ont servi à rembourser les créanciers privés, notamment les banques en Allemagne et en France. La Grèce n’a reçu que des miettes, mais elle a payé le prix fort pour préserver les systèmes bancaires de ces pays. »

Plusieurs études ont révélé qu’au moins 77 % de cette somme a servi à payer les créanciers et à recapitaliser les banques privées grecques. Autrement dit, pour cinq euros empruntés, un seul est allé dans les caisses de l’État grec. Mais tous ces prêts ont bel et bien été comptabilisés dans la dette du pays, ils génèrent des intérêts… et nécessitent, pour être payés, de faire de nouveaux emprunts. Sans parler des dépenses des gouvernements précédents, dont la priorité n’était pas d’aider la population à s’en sortir. Ainsi, le budget militaire a été, des années durant, le plus important d’Europe en proportion des dépenses budgétaires.

Alors, quels que soient les noms donnés aux plans européens, qu’ils soient dits « d’aide » ou « de sauvetage », ils consistent tous à saigner les peuples pour engraisser la finance.

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