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Espagne : le changement pour les classes populaires ne viendra pas des « pactes » mais des luttes
Les résultats des récentes élections municipales et des Parlements de la grande majorité des Autonomies (c’est-à-dire des grandes régions d’Espagne) confirment que le développement rapide des deux nouveaux partis a entraîné un changement important de la donne politique dans l’ensemble du pays.
En effet, d’une part Podemos qui exprime une contestation politique et sociale ancrée à gauche, et d’autre part Ciudadanos, tourné vers l’électorat du centre et de la droite, ont remporté des scores importants qui rendent plus difficile la constitution d’une majorité pour diriger les institutions régionales ou municipales. Pour parvenir à élire des présidents de parlements locaux ou des maires, les partis se trouvent obligés de construire des « pactes » qui se font et se défont en fonction des circonstances.
Les élections pour le renouvellement du Parlement d’Andalousie qui se sont déroulées il y a deux mois en ont donné un exemple. Si Sylvia Diaz, la présidente PSOE sortante, avait conservé un score important, elle ne disposait pas d’une majorité d’élus. Il lui fallait donc pour garder sa place à la tête de la région conclure un accord avec au moins l’un de ces deux nouveaux partis qui ont obtenu plusieurs élus régionaux. Depuis deux mois, les négociations entre les partis ont été d’autant plus tourmentées que, si aucune majorité ne s’était dégagée, il aurait fallu annuler les élections. Podemos refusait les conditions de Sylvia Diaz, et c’est finalement Ciudadanos qui malgré les avances du PP, le Parti Populaire, de droite, actuellement au pouvoir, a choisi de soutenir la candidate socialiste, moyennent quelques engagements sur la lutte contre la corruption.
Les problèmes de tactique politicienne qui se sont posés en Andalousie se posent visiblement aussi dans d’autres régions. Dans bien des municipalités, la constitution des majorités mettra à l’ordre du jour des alliances multiples. Pendant que le PP essaie d’attirer Ciudadanos pour écarter le PSOE, ce dernier et Podemos tantôt se rapprochent, tantôt s’écartent.
Mais si toutes ces péripéties politiciennes occupent le devant de l’actualité, elles ne constituent pas l’essentiel. Il reste que les élections en cours sont marquées par l’expression du ras-le-bol des classes populaires. Dans plusieurs grandes villes comme Madrid ou Barcelone, les scores de Podemos sont significatifs. Plusieurs candidats qui avaient choisi de faire campagne sur la situation inacceptable des travailleurs, des chômeurs et des pauvres ont été élus avec des scores importants. La lutte acharnée des partis en place depuis longtemps, les manœuvres politiques visant à conclure des « pactes » nécessaires pour constituer des majorités vont s’accentuer, avec à l’horizon la perspective des élections générales pour le Parlement de l’ensemble du pays d’où sortira le futur chef du gouvernement.
En attendant, il y a une autre réalité. Il y a la crise et les mensonges sur la reprise. Il y a des attaques contre les travailleurs. Il y a le chômage et la précarité qui augmentent et la baisse réelle des salaires. Mais il y a aussi la contestation, la volonté de changer les choses qui depuis maintenant plusieurs années s’est exprimée, dans la rue, dans les quartiers populaires et dans de nombreux secteurs. Alors si l’actualité politicienne montre une chose, c’est que les classes populaires ne doivent pas se faire entendre que dans les urnes mais dans les luttes sociales.