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France-Maroc : collaboration judiciaire contre les opposants
Le gouvernement français vient de déposer devant l’Assemblée nationale, pour examen en procédure accélérée, un projet de loi sur l’entraide judiciaire entre France et Maroc. Si cette loi est votée, elle rendra beaucoup plus difficile le recours devant la justice française de victimes de crimes commis au Maroc.
C’est le 6 février que la ministre de la Justice Christiane Taubira et son homologue marocain ont signé un accord modifiant la Convention d’entraide judiciaire entre les deux pays, accord que le gouvernement français veut faire entériner au plus vite. Il prévoit que chacun des deux pays informe immédiatement l’autre de toute procédure pénale ouverte sur son territoire qui pourrait engager la responsabilité d’un ressortissant de l’autre pays.
Ainsi, si le crime ou délit faisant l’objet d’une enquête en France est gênant pour l’État marocain, celui-ci sera immédiatement mis au courant par les autorités françaises et aura plus de possibilités pour interférer dans le déroulement de l’enquête, prévenir les personnes mises en cause, intimider les victimes ou les témoins, etc.
Cet accord rendra par exemple impossible le désagrément subi par Abdellatif Hammouchi, le chef des services de renseignements marocains, en février 2014. Se trouvant en France sans immunité diplomatique, il avait reçu la visite de policiers français le convoquant devant un juge au sujet de plusieurs plaintes pour torture et complicité de torture.
Depuis, Hammouchi n’a plus été inquiété par la justice française, et Bernard Cazeneuve, le ministre de l’Intérieur, a même annoncé en février 2015 qu’il devrait bientôt être décoré de la Légion d’honneur. Mais il semble que cela n’était pas encore suffisant pour mettre fin au froid diplomatique entre les deux pays déclenché par cet « incident regrettable », comme a osé le qualifier Cazeneuve.
Avec cette dernière modification de la Convention d’entraide judiciaire entre la France et le Maroc, un incident de ce genre pourra être évité… au détriment de toutes les victimes de l’État marocain qui n’ont souvent d’autre solution pour se faire entendre que de porter plainte devant des tribunaux étrangers.