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Cinéma : La mort de René Vautier
Jeune résistant à 16 ans, René Vautier fit à la sortie de la guerre des études pour devenir réalisateur. En 1949, la Ligue de l'enseignement lui commanda un film sur la vie des paysans d'Afrique occidentale française, qui regroupait alors le Sénégal, la Côte d'Ivoire, le Niger, etc. Il dut affronter l'administration coloniale qui, au nom d'une loi Laval, ministre des Colonies en 1934, entendait contrôler son film. Il lui fallut astuce et ténacité pour passer outre et, malgré la saisie de 33 bobines, en tirer un documentaire de 44 minutes, Afrique 50 qui, en termes simples et percutants, dénonçait l'exploitation des Africains par les entreprises françaises et soutenait leur révolte contre la dictature coloniale.
Ce film lui rapporta un prix international mais aussi, de la part de l'État français, treize condamnations et de la prison. Avec l'appui des réseaux des Jeunesses communistes, des Jeunesses socialistes et des Auberges de jeunesse, ce film n'en fut pas moins vu clandestinement par un million de spectateurs.
En 1951, Vautier tourna Un homme est mort, sur une lutte gréviste à Brest. Le film soutenait les orientations de la CGT et du PCF, dont il était membre. Puis il tourna deux films en Tunisie et plusieurs en Algérie entre 1955 et 1957, dont Algérie en flammes sur les maquis du FLN algérien (film également interdit !). En 1959-1960, il fut emprisonné par le FLN, victime des guerres de fractions en son sein. Sorti de prison, il réalisa des films pour l'Algérie indépendante et y forma des cinéastes.
Vautier revint en 1972 sur la guerre d'Algérie, vue du côté d'appelés bretons, avec son film le plus connu, Avoir 20 ans dans les Aurès, où Philippe Léotard jouait le rôle d'un officier manipulateur. En 1973, Vautier fit une grève de la faim contre la censure du film Octobre à Paris qui dénonçait le massacre des Algériens du 17 octobre 1961, sous de Gaulle et Papon.
Politiquement, Vautier était resté fidèle au PCF après 1968, sans se laisser emprisonner dans la politique de ce parti, et sans l'imposer aux cinéastes avec qui il collaborait, ce qui lui valut l'étiquette de « franc-tireur ». La dénonciation du colonialisme français, à une époque où le PCF défendait encore l'Union française, c'est-à-dire le pillage des colonies par l'impérialisme français, restera attachée à son nom.
Jacques Fontenoy
Afrique 50 et Avoir 20 ans dans les Aurès existent en DVD.