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Grèce : Crise politique, chantage du FMI et intérêts des travailleurs
En effet, ce dernier a tenté de se maintenir au pouvoir en organisant une élection présidentielle anticipée. Seuls les 300 députés du Parlement étaient appelés à voter. Mais si aucune majorité ne sort, après trois tours de scrutin, alors l'Assemblée est dissoute. Samaras espérait que la perspective de retourner devant les électeurs pousserait suffisamment de députés à se rallier à sa politique et à le soutenir encore pour un temps. Mais son discrédit est tel que sa manoeuvre n'a pas marché.
Depuis 2010 et le début de la crise de la dette, tous les gouvernements grecs ont fait payer très cher à la population le prétendu redressement des finances publiques. En moyenne, les salaires ont baissé de près d'un quart. Le chômage touche désormais 27 % de la population et plus de 50 % des jeunes de 15 à 24 ans. D'après les statistiques officielles, plus du tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté. Et le salaire minimum, quand il est respecté, est gelé jusqu'en 2016 à 580 euros brut par mois.
Depuis février 2012, le gouvernement grec est sous la tutelle directe de ses usuriers représentés par la « Troïka » du Fonds monétaire international, de la Banque centrale européenne et de la Commission européenne. Sous prétexte d'aider la Grèce à rembourser sa dette, la Troïka a imposé une aggravation des politiques d'austérité. Les fonctionnaires partant en retraite ne sont plus remplacés et les coupes dans les budgets des services publics sont catastrophiques. Dans l'Éducation, la situation est telle que le ministre a proposé en novembre dernier que 1 100 postes soient occupés par des enseignants bénévoles avec la promesse que leurs noms seraient peut-être retenus lors de futurs réels recrutements. Le système de santé a, lui, été rejeté des années en arrière. De nombreux hôpitaux ont fermé (13 en 2013), 10 000 lits ont été supprimés dans tout le pays et près de trois millions de personnes sont exclues du système de santé public.
Les classes populaires grecques sont de moins en moins prêtes à accepter tout cela sans broncher. Elles l'ont montré lors des journées de grèves et de manifestations nationales organisées par les syndicats des salariés du public et du privé, notamment celle du 27 novembre dernier. Et le mécontentement s'est aussi exprimé lors des élections européennes du printemps 2014. L'alliance électorale Syriza devenue un parti, qui se situe à gauche du parti socialiste (PASOK, actuellement dans le gouvernement de coalition de Samaras) et qui est dirigé par Alexis Tsipras, est arrivée en tête pour la première fois à un scrutin national.
L'actuel gouvernement aurait pu espérer rester en place quatre ans, jusqu'en juin 2016. Mais la contestation croissante a fait s'effriter sa coalition gouvernementale. D'autant plus que la fin de la tutelle de la Troïka, initialement promise pour fin décembre 2014 et présentée par le gouvernement comme la compensation à tous les sacrifices imposés, n'était plus acquise. Celle-ci, sous prétexte que le budget 2015 ne la satisfaisait pas, a parlé de prolonger sa tutelle en redemandant une nouvelle série de mesures impopulaires.
À peine les nouvelles élections législatives annoncées, le FMI a déclaré qu'il suspendait son aide financière à la Grèce jusqu'à la constitution du prochain gouvernement. Les déclarations des hauts responsables européens, dont le socialiste français Moscovici, sont allées dans le même sens : menaçantes à l'égard de la population grecque si elle « votait mal ». Car pour tous ces valets des puissances financières européennes et mondiales, la population doit accepter de se laisser dépouiller et se taire.
Dans les sondages, Syriza est en tête, et nombre de ses électeurs espèrent que Tsipras, s'il arrive au pouvoir, prendra des mesures radicales pour redresser le niveau de vie des couches populaires. Mais rien n'est moins sûr. À l'approche du pouvoir, Tsipras cherche à montrer son sens des responsabilités envers la bourgeoisie. Il ne parle plus de ne pas payer la dette mais de la renégocier. Il cherche à élargir sa coalition, y compris en se tournant vers certains politiciens qui soutenaient Samaras, comme ceux du parti de la Gauche démocrate (DIMAR).
Alors, pour les classes populaires grecques, la seule garantie qu'un changement de politique s'opère dans le sens de leurs intérêts est qu'elles exercent elles-mêmes directement une pression sur le pouvoir, quel qu'il soit, par leurs mobilisations et derrière leurs propres revendications vitales.