Turquie : Erdogan, tartuffe et misogyne03/12/20142014Journal/medias/journalnumero/images/2014/12/2418.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Turquie : Erdogan, tartuffe et misogyne

Le président turc Erdogan ne se contente pas d'exhiber largement sa hargne et son mépris à l'égard des opposants à sa politique, et d'avoir sa part de responsabilité dans la crise du Moyen-Orient en ayant soutenu les groupes djihadistes. Le 24 novembre, il a donné sa version, complètement moyenâgeuse, de l'égalité femmes-hommes.

« Vous ne pouvez pas demander à une femme de faire tous les types de travaux qu'un homme fait, comme c'était le cas sous les régimes communistes. Vous ne pouvez pas leur demander de sortir et de creuser le sol, c'est contraire à leur nature délicate », a-t-il dit.

Pour Erdogan, le rôle des femmes est de faire des enfants, au moins trois. La jeunesse devrait s'occuper davantage de religion, et la mixité devrait être proscrite. Il y a un an déjà, alors Premier ministre, il avait insinué que « personne ne sait ce qui se passe dans les résidences étudiantes. Peut-être qu'il s'y passe des choses douteuses. » Une campagne contre les jeunes habitant en colocation s'en était suivie, son gouvernement s'étant alors déclaré « garant des enfants que [lui] confient leurs parents » et, à ce titre, en devoir de tout surveiller. « En tant que gouvernement conservateur et démocratique », il avait « donné des instructions aux préfets pour mettre en place des contrôles ».

Un mois plus tôt, en octobre 2013, le gouvernement d'Erdogan s'était illustré en intervenant à la suite d'une émission de télévision sur la tenue vestimentaire des femmes. Le porte-parole de l'AKP, le parti d'Erdogan, avait alors jugé la robe de la présentatrice trop décolletée et donc « pas acceptable. Nous ne nous mêlons pas de la vie privée des gens, mais c'était trop. » L'animatrice populaire avait ensuite été licenciée.

La bigoterie d'Erdogan et de ses proches tente de s'imposer partout. La présidente des Affaires religieuses turques, liée au gouvernement, propose de faire construire une mosquée dans chaque université d'État. L'organisme s'est récemment vanté de ce que des mosquées « sont en construction dans plus de quatre-vingts universités ». Quelques semaines auparavant, Erdogan avait claironné dans les médias, sans preuve à l'appui, que c'étaient des marins musulmans qui avaient découvert l'Amérique... trois siècles avant Christophe Colomb. Il avait même la date : 1178 !

Ces déclarations réactionnaires et farfelues n'ont pas de quoi faire rire. Les conséquences pour la vie de la population, en particulier pour les femmes, peuvent être graves. Les prises de position réactionnaires, misogynes et bigotes encouragent les comportements machistes traditionnels. Le nombre des meurtres de femmes augmente et plus de 200 femmes ont déjà été assassinées cette année, le plus souvent par leur conjoint ou un membre de leur famille. Pour le seul mois de juin, 17 femmes ont été assassinées et 56 autres blessées, lors d'une séparation ou d'un divorce.

Le pouvoir d'Erdogan et de ses semblables est dangereux pour les droits des femmes et pour toute la population, en Turquie et même autour.

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