L'armée française vient de déclassifier, très tardivement (54 ans après l'explosion !), certains documents concernant le premier essai nucléaire réalisé dans le Sahara. On y voit que le tir de cette première bombe, appelée Gerboise Bleue, a créé un nuage qui s'est étendu bien au-delà de l'immense Sahara, sur l'Afrique de l'Ouest, et aussi vers le nord jusque sur la Méditerranée, la Sicile et les côtes d'Espagne.

Évidemment, l'armée prétend que le nuage était tellement dilué que les risques étaient quasi nuls. Il n'empêche que plusieurs militaires qui ont assisté à ce tir, et aux suivants, demandent réparation pour des maladies qu'ils ont contractées depuis, presque toujours sans succès. Quant aux populations locales, nomades du Sahara, Algériens, habitants du Mali, etc., leurs plaintes ne sont même pas entendues.

La France s'est livrée alors à quatre essais aériens au Sahara, puis à treize essais souterrains, dont un qui a mal tourné, car il y a eu des fuites dans l'atmosphère.

Après quoi, avec l'indépendance de l'Algérie, l'armée française a plié bagage et s'est installée dans le Pacifique, en Polynésie. Elle y a procédé à 46 essais aériens et 147 souterrains. Là aussi, des militaires français et des populations locales ont été contaminés. Combien ? Il n'y a jamais eu de véritable enquête sur le sujet.

Par ailleurs la Grande-Bretagne et les États-Unis se sont aussi livrés à une débauche d'essais nucléaires.

Au total 322 essais ont eu lieu dans le Pacifique et en Australie, 175 dans l'atmosphère et 147 souterrains. On y a fait sauter l'équivalent de 11 795 fois la puissance de la bombe d'Hiroshima ! Autant dire que bien des zones du Pacifique sont archi-contaminées. Et beaucoup d'anciens militaires et de populations sont victimes de la radioactivité.

Pour l'ex-Union soviétique, les choses sont moins précises. On crédite ce pays de 715 essais, en Sibérie, Kazakhstan, zones arctiques, avec leur lot de contaminations. Quant à la Chine, elle a fait 44 essais dans le Xinjiang, où il y aurait eu un nombre énorme de victimes.

Le petit coin de voile que soulève l'armée française est donc encore peu de chose. Mais l'armée reste toujours aussi réticente à livrer ses documents, encore plus à indemniser ses propres soldats, et ne veut même pas entendre parler d'indemniser les populations locales. Le scandale continue donc.