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- Lutte ouvrière n°2357
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Editorial
Faute de combattre la bourgeoisie, Hollande fait la guerre aux travailleurs et aux Roms
Il y a 5 millions de femmes et d'hommes privés d'emploi, 3,5 millions de mal-logés, 8 millions de pauvres, dont bien des salariés incapables de joindre les deux bouts à cause des salaires de misère. Et qu'est-ce qui fait réagir le monde politicien ? Le « problème rom » !
« Ils ne veulent pas s'intégrer », prétend Valls, ministre de l'Intérieur. Mais comment pourraient-ils le faire quand ils ne savent où s'installer, quand ils sont condamnés à vivre sur des terrains désaffectés, sans eau, coincés entre deux voies rapides ? Comment peuvent-ils scolariser leurs enfants quand ils sont chassés tous les trois mois et forcés d'errer de bidonville en bidonville ?
Prétendre que la présence de 17 000 Roms – nombre stable depuis dix ans – est un problème insoluble, pour un pays de 65 millions d'habitants, est écoeurant. Les mêmes politiciens qui reprochent aux Roms de vivre de mendicité et de trafics leur ont interdit de gagner leur vie dignement, en travaillant.
En 2007, lorsque la Bulgarie et la Roumanie ont rejoint l'Union européenne, les habitants de ces pays ont fait l'objet de lois d'exception. À l'inverse des autres ressortissants de l'UE, ils ont été interdits de travail, sauf à s'inscrire dans une liste de métiers bien particuliers et à demander des dérogations. Alors oui, par la force des choses, les Roms n'ont pas le même mode de vie que les autres !
Rappelons-nous comment ont été traités les millions de travailleurs algériens et marocains, alors même que le patronat était allé les chercher, ratissant les campagnes d'Afrique du Nord pour transformer ces jeunes paysans en chair à exploiter. Intégrés, ils l'étaient, et ô combien. Sans eux, les chaînes de montage des usines d'automobiles n'auraient pas tourné, les barrages, les routes et les logements n'auraient pas été construits. Ils ont été à la base de la prospérité économique. Et pourtant, comment ont-ils été traités ?
Combien d'entre eux ont dû dormir pendant des mois sur des sacs de ciment, avant de se trouver un lit dans un dortoir sordide ? Les bidonvilles des années 1950 et 1960, à Nanterre et ailleurs, n'étaient pas roms : c'étaient des bidonvilles de travailleurs. Voilà le sort que la société capitaliste réserve aux exploités.
La différence avec les années 1950, 1960 et 1970, c'est qu'aujourd'hui les Roms n'ont même pas le droit de se faire exploiter puisqu'ils n'ont pas de travail. Leur seul crime est d'être des pauvres parmi les pauvres et, dans cette société capitaliste, cela ne pardonne pas.
Depuis qu'il est ministre de l'Intérieur, Valls a multiplié les expulsions de camps roms et les reconduites à la frontière, ajoutant l'acharnement policier au dénuement. Aujourd'hui, il accorde ses mots avec ses actes.
Le Parti socialiste est, depuis longtemps, aussi dévoué à la bourgeoisie que l'est la droite. Mais il mettait un point d'honneur à enrober sa politique antiouvrière et antipauvre d'un langage vaguement teinté d'humanisme et de tolérance. Les propos de Valls, soutenus par la plupart des dirigeants du PS et par Hollande, montrent que même sur ce terrain, plus rien ne les distingue de la droite ni même... de l'extrême droite.
En faisant des Roms un « problème », Valls fouille dans les mêmes poubelles que Le Pen, comme Sarkozy et tant d'autres hommes de droite l'ont fait avant lui. Il renforce le Front national, ajoute aux fantasmes sur « l'invasion rom ».
Valls veut chasser les Roms, pour ne pas « ajouter de la misère à la misère ». Mais on peut et on doit avoir l'objectif de combattre la misère, de combattre le chômage, de régler le manque de logements. Le Parti socialiste y a renoncé.
Les dirigeants du PS ont pour politique de servir les riches. Ils se prosternent devant la bourgeoisie, devant son mode de vie, devant ses yachts, ses millésimes, ses châteaux. Alors que c'est justement l'oisiveté, le vol à grande échelle et le parasitisme de la bourgeoisie qui plongent le reste de la société dans les privations et bloquent tout progrès de la civilisation.
Dans cette société d'exploitation, même ceux qui sont à la base de la création des richesses, les travailleurs, sont exclus de l'accès au progrès et au mieux-vivre. Les travailleurs transformés en chômeurs, les sans-abri, les Roms, tous les parias de la société capitaliste le sont à plus forte raison.
Ce n'est pas eux qu'il faut chasser, mais la bourgeoisie, les parasites irresponsables qui privent la société de son humanité.
Éditorial des bulletins d'entreprise du 30 septembre