Tapie : Un héros de notre temps ?04/07/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/07/une2344.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Tapie : Un héros de notre temps ?

Lundi 1er juillet, France 2 nous a servi, en « prime time », c'est-à-dire en début de soirée, un nouvel épisode du feuilleton Tapie – sans doute malheureusement pas le dernier. On a pu voir l'affairiste se présenter en victime d'un infâme complot, victime qui, notons-le, bénéficie d'une tribune médiatique qu'envieraient bien des accusés.

Pourtant, il aura du mal à tirer des larmes sur son sort. En tout cas, il n'en tirera pas aux travailleuses et aux travailleurs et à leurs proches, qu'il a, au cours de ses aventures industrielles et financières, laissés sur le carreau. Car sa carrière et sa fortune, il les a établies en rachetant pour trois fois rien, souvent le franc symbolique, des entreprises en perdition, qu'il revendait ensuite avec des millions de plus-value, en ayant jeté par-dessus bord les salariés qui y avaient un travail. À son tableau de chasse figurent entre autres des entreprises comme Wonder, Terraillon, Testut. Il a su, c'est un fait, bien mener sa barque – dans son cas mieux vaudrait dire son yacht – en manoeuvrant de tous les bords. À droite, au centre, mais aussi, et on a trop souvent tendance à l'oublier, à gauche.

Il patauge aujourd'hui dans cette affaire dite d'arbitrage, dans laquelle sont compromises des personnalités de droite. Mais c'est la gauche, et en particulier Mitterrand, qui lui mit le pied à l'étrier. Il fut d'abord adoubé par le PS, à partir de 1988, comme candidat lié à la majorité présidentielle, pour finalement être appelé dans le gouvernement présidé par Bérégovoy comme ministre de la Ville, en 1992.

Il était devenu en effet l'image symbolique de ces hommes audacieux, plein d'idées, volontaristes, qui prouvent que, lorsqu'on ne s'embarrasse pas trop de scrupules, « quand on veut on peut ». Une image, un mythe qui pouvait faire rêver une partie de la jeunesse des banlieues et, que le PS a largement contribué à forger, non pas seulement parce que Mitterrand avait été fasciné par le personnage, mais parce que, en bon politicien, il lui fallait trouver de quoi faire rêver.

Des individus de cet acabit, il y en a eu d'autres dans l'histoire, pour profiter du mélange de la politique et de leurs petites ou grandes affaires, pour prospérer au mieux, aux frais de leur État. Et aujourd'hui, sans aller bien loin de Marseille, au-delà des Alpes, en Italie, on a du mal à dire qui, de Tapie ou de Berlusconi, est le plus talentueux en la matière.

Tels sont les héros que génère cette société.

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