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Syrie : Deux ans après les premières manifestations, la population prise en tenaille
Le 18 mars, les dirigeants de la coalition nationale de l'opposition syrienne, qui depuis novembre dernier cherche à réunir les divers groupes d'opposants au régime de Bachar El-Assad, avaient désigné un Premier ministre. Mais une semaine plus tard le président de cette même coalition, Ahmed Moaz Al-Khatib, annonçait sa démission, montrant l'existence de désaccords entre les candidats à la succession de la dictature.
Ghassan Hitto, ex-cadre d'une entreprise texane de télécommunications et ex-directeur d'une institution éducative islamiste au Texas, avait été désigné comme Premier ministre intérimaire des territoires du nord et de l'est de la Syrie conquis par les insurgés, et aurait le soutien du Qatar. Lors de son élection, une vingtaine de dirigeants présents avaient refusé de participer au scrutin.
Ahmed Moaz Al-Khatib, le président démissionnaire, est un fils d'imam et lui-même un ex-imam d'une mosquée de Damas en opposition avec Assad. Par sa démission, il entendait notamment protester contre l'influence du Qatar et de l'Arabie saoudite au sein de la coalition. Mais deux jours après, il a accepté d'occuper le siège de la coalition au sein de la Ligue arabe, qui aurait en outre promis de lui fournir des armes.
Deux options partagent actuellement la coalition : les uns veulent encore dialoguer avec le régime d'Assad pour tenter de dégager un gouvernement provisoire comprenant des membres de l'opposition et du régime actuel, option qui aurait le soutien de l'Arabie saoudite et peut-être de Washington. Les autres souhaitent la rupture complète avec le régime et la formation d'un gouvernement intérimaire. Ce serait le choix du Qatar et du nouveau Premier ministre.
Depuis sa création, cette coalition reste un ensemble hétéroclite où dominent les Frères musulmans, en fait plutôt coupée des combattants en Syrie. L'Armée syrienne libre (ASL), qui fait partie de la coalition, est loin de regrouper tous les groupes armés. En effet certains des groupes djihadistes qui combattent Assad se refusent à entrer dans l'ASL. D'autres, armés par l'Iran, interviennent en soutien au régime d'Assad, mais n'hésiteraient pas à jouer leur carte si celui-ci finissait par s'effondrer.
On est loin de la situation d'il y a deux ans, quand les manifestations avaient commencé au sein de la population elle-même, encouragée par les mouvements qui avaient entraîné la chute des dictateurs tunisien et égyptien. Les aspirations de la population sont passées depuis longtemps au second plan. Ce qui domine désormais est une âpre guerre civile où les groupes rivaux engagés n'agissent que pour faire triompher leur clan et se moquent bien des conséquences pour une population prise entre deux feux.
Au début des manifestations contre Assad, les grandes puissances n'étaient pas pressées de voir tomber un régime avec lequel elles avaient composé depuis longtemps et qui avait montré son utilité. Aujourd'hui, leur principal souci est de se positionner vis-à-vis de l'opposition pour le cas où le régime finirait par tomber. La question de la fourniture d'armes pour aider l'opposition à affronter Assad est un de leurs moyens de pression.
La population n'a rien à attendre du régime Assad qui, dès le départ, a choisi de réagir à ses manifestations par une répression violente. Mais elle n'a rien à attendre non plus de cette opposition dominée par les groupes les plus réactionnaires, dont certains membres sont d'ailleurs d'ex-dignitaires du régime Assad ou des alliés des différents États de la région, Qatar, Arabie saoudite ou Iran, tous avides avant tout de tirer profit de la fin du régime pour eux-mêmes.