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Dans le monde
Allemagne : Le scandale des greffes d'organes
Depuis des mois se succèdent en Allemagne les révélations de cas de manipulations sordides dans des centres de transplantation. L'affaire a commencé lorsque l'on a appris, en juillet dernier, qu'un chirurgien de l'hôpital universitaire de Göttingen avait falsifié les résultats d'analyse de 23 de ses patients, malades du foie, afin de les faire apparaître plus malades qu'ils ne l'étaient.
Cela a permis de les rendre prioritaires sur la liste d'attente des receveurs potentiels, établie par l'organisation indépendante Eurotransplant qui assure, dans sept pays européens, la gestion et l'attribution des organes.
Des pratiques similaires ont par la suite été découvertes à l'hôpital de Ratisbonne, puis à la clinique de Munich, et début 2013 au CHU de Leipzig. Depuis, des enquêtes sont en cours : des patients, qui auraient été réellement prioritaires, sont-ils décédés du fait de ces actes sordides ? Les autorités administratives des hôpitaux concernés étaient-elles au courant ? Y a-t-il eu de telles irrégularités ailleurs ? C'est une hypothèse qui est d'autant moins à écarter que la Chambre des médecins a elle-même annoncé qu'elle estimait qu'au cours des cinq dernières années plus de 500 médecins ont été sanctionnés pour des faits de corruption.
Une des premières conséquences de ces actes a en tout cas été une méfiance croissante de la population et une baisse du don d'organes, ce qui a des conséquences catastrophiques pour nombre de malades aujourd'hui. Le chef du groupe parlementaire du SPD Steinmeier réclame des sanctions aggravées pour les médecins qui ont manipulé ces listes. Mais l'absence de scrupules et la vénalité de certains médecins ne sont pas seules en cause. Elles font partie d'un système de santé avant tout gouverné par le profit.
L'été dernier, on a ainsi appris que pendant des années l'État lui-même avait organisé des séminaires dans lesquels était enseigné aux médecins comment on pouvait vendre au mieux aux patients des prestations, de dépistage par exemple, non remboursées par la Sécurité sociale, et cela même lorsque le patient n'en a pas besoin.
Quant aux hôpitaux, ils sont de plus en plus poussés à décider de quelle manière un traitement est « rentable ». S'ils ne le font pas, ils courent à la faillite. C'est une conséquence du système de comptabilité introduit lors de la réforme de la santé de 2004 avec des quotas et des « forfaits à l'acte », selon lesquels les caisses de Sécurité sociale ne remboursent plus que des montants forfaitaires pour un traitement déterminé. On a donc introduit dans de nombreux hôpitaux la profession spéciale de « manager pour les forfaits à l'acte ». Ce n'est pas un médecin spécialisé, mais il décide si et comment on doit intervenir, et sans doute en fonction de ce qui rapporte le plus d'argent à l'hôpital.
Ce ne sont là que quelques-unes des conséquences folles du fait qu'on transforme de plus en plus les hôpitaux de service public, et la santé en général, une entreprise devant générer du profit. Cette « logique économique » ne rend pas le système de santé plus efficient et moins coûteux, elle rend simplement les patients... malades.