Schaeffler -- Calais : Un million d'argent public pour une milliardaire10/10/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/10/une2306.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Schaeffler -- Calais : Un million d'argent public pour une milliardaire

L'entreprise Schaeffler, qui fabrique des chaînes de transmission automobile, investit vingt millions d'euros pour déménager du centre-ville de Calais en zone franche, dans des locaux un peu plus grands, et pour payer moins d'impôts. De plus, elle demande des subventions pour s'installer. La communauté d'agglomération, de droite, va lui avancer 300 000 euros, pour une période de cinq ans et sans intérêt. La région et l'État, dirigés par le PS, vont y ajouter 600 000 euros.

En contrepartie, la direction de Schaeffler dit s'engager à conserver les 270 emplois en CDI à Calais pendant la même période et à en créer 50 nouveaux. Même si cette promesse était respectée, il n'en reste pas moins qu'il y avait 600 salariés à Schaeffler Calais en 2003. En 2009, l'effectif était déjà tombé de moitié quand, avec le « plan de redressement » elle en a licencié 110 de plus, tout en fermant le site de l'Isère avec ses 92 emplois.

Depuis trois ans, le « redressement » a signifié l'intensification de l'exploitation. Des licenciés au chômage, qui avaient travaillé comme ouvriers qualifiés parfois plus d'une dizaine d'années dans l'entreprise, y ont été repris aussitôt... comme intérims sous-payés. Malgré la baisse de l'effectif, la production n'a pas baissé, avec près de 24 000 mètres de chaîne par jour. Quand l'effectif est revenu au niveau d'avant 2009, la cadence est montée à 28 000 mètres.

Pas un euro d'argent public ne devrait aller dans les caisses de Schaeffler. Mais, à la municipalité, à la région, l'UMP et le PS ont défendu l'octroi de l'aide financière. Même le Parti communiste a plaidé pour, émettant seulement une réserve au conseil régional, avec une incitation à « beaucoup de vigilance ».

En l'occurrence, l'agent public ne coule pas vers une petite entreprise familiale en difficulté. Maria-Élisabeth Schaeffler est à la tête d'un groupe mondial qui s'est agrandi et enrichi par le rachat d'entreprises, et qui aujourd'hui exploite 74 000 salariés dans 51 pays, sur 186 sites.

Sa dernière offensive financière, qui a consisté en 2008 à avaler Continental, le 4e fabricant mondial de pneus, un groupe trois fois plus gros que sa propre société, a été un coup de poker de trop : ne disposant que de trois milliards pour un coût de huit milliards, elle a échafaudé secrètement, en s'associant avec des banques, un montage financier douteux. Le groupe en 2009 s'est retrouvé endetté de 22 milliards d'euros et finalement mis au bord de la faillite. En Allemagne, les larmes de Maria-Élisabeth Shaeffler, quémandant une aide de l'État, avaient alors fait la une des journaux. Mais la conséquence avait été la fermeture d'usines comme celle de Clairoix, dans l'Oise, et le licenciement de ses travailleurs.

Quels que soient les aléas boursiers -- la valeur des actions de Continental vient de baisser en ce début d'octobre -- Mme Schaeffler n'a rien à craindre pour sa fortune familiale, mère et fils, estimée en 2011 à 10 milliards de dollars et classée au 104e rang mondial. Elle vient d'ailleurs d'engranger d'un coup plus d'un milliard d'euros, en revendant 10 % des actions Continental qu'elle possède.

Schaeffler est un des multiples exemples de l'irresponsabilité totale de la bourgeoisie qui, par sa rapacité, met en danger entreprises et salariés et a encore l'audace de demander -- et de recevoir -- l'aide des pouvoirs publics !

Partager