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- Lutte ouvrière n°2296
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Turquie : La répression à l'oeuvre
Le 23 juillet la presse turque a annoncé la promotion d'un commissaire comme directeur adjoint de la police criminelle d'Istanbul, alors qu'il s'agit d'un tortionnaire, précédemment condamné pour des tortures et viols exercés sur plusieurs jeunes femmes à la fin des années 1990. Non seulement il ne nie pas les faits mais il persiste et signe en déclarant qu'à l'époque, n'étant que commissaire, il obéissait aux ordres. Visiblement tout cela n'a nullement gêné ceux qui ont décidé de sa promotion.
Cette mansuétude des autorités est en tout cas très sélective, comme le montre le cas de la jeune étudiante française d'origine turque Sevil Sevimli arrêtée en mai en Turquie. Étudiante à Lyon et partie dans ce pays dans le cadre des échanges Erasmus, elle n'a torturé ni violé personne mais seulement participé à la manifestation du 1er Mai dans la ville d'Eskisehir, d'où sont originaires ses parents, et aussi assisté à un concert du groupe musical de gauche Grup Yorum. À la suite de quoi elle a été arrêtée et se trouve toujours en prison sous l'inculpation de participation à une organisation terroriste, accusation classique brandie à l'encontre des opposants de gauche par la justice turque, nullement émue jusqu'à présent par les 12 000 signatures qu'a recueillies en France une pétition réclamant sa libération.
Ainsi, alors que dans les premières années du gouvernement d'Erdogan et de son parti l'AKP on avait pu constater une certaine démocratisation, bien limitée il est vrai, il y a maintenant un retour aux habituelles méthodes arbitraires. Autrefois le régime condamnait en brandissant l'accusation de « communisme », maintenant il brandit systématiquement celle de « terrorisme » qui permet d'utiliser les procédés arbitraires de la loi antiterroriste. 9 000 personnes seraient actuellement en prison dans le pays sous cette accusation, la majorité étant des militants ou sympathisants de la cause kurde, mais pas seulement. Ainsi plus de 700 étudiants et presque une centaine de journalistes sont emprisonnés pour avoir protesté contre la violation de droits élémentaires. On peut citer également le cas des dirigeants du syndicat de la fonction publique KESK ou celui de l'éditeur et militant Ragip Zarakolu et de l'universitaire Büsra Ersanli poursuivis pour avoir pris fait et cause pour les droits de la minorité kurde.
Derrière les discours démocratiques du gouvernement de l'AKP, qui sent sans doute le mécontentement monter, les vieilles méthodes répressives de l'État turc reviennent ainsi en force. Le nombre de personnes en prison, qui était de 80 000 en 1980, est maintenant passé à 130 000. Mais comme dit un proverbe turc : « La peur de la mort ne l'empêche pas d'arriver » !