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Leur société
Même si c'est leur métier : Les banquiers ne sont pas prêteurs
Profitant de l'offre de la BCE de leur prêter de l'argent sur trois ans à 1 %, 523 banques européennes lui ont emprunté au total 489 milliards d'euros à la fin du mois de décembre. Il s'agissait, selon les dirigeants de la BCE, d'inciter les banques à alimenter en crédits les entreprises et les particuliers, à acheter les obligations émises par les États européens et à lutter contre le risque de blocage du marché des prêts interbancaires, les banques étant de plus en plus méfiantes les unes vis-à-vis des autres.
Pour l'instant, ni le marché du crédit interbancaire, -- les prêts que les banques s'accordent entre elles au jour le jour pour pouvoir boucler leurs opérations -- ni celui des crédits aux entreprises et aux particuliers, jugés sans doute trop risqués, n'ont, pour l'essentiel, vu la couleur de cet argent.
Une (toute) petite partie de ces milliards aurait servi pour des prêts aux États européens, mais en faisant payer le prix fort à l'emprunteur. Par exemple un taux de 6,98 % a été extorqué à l'État Italien pour les 7 milliards d'obligations à dix ans émises le 29 décembre. Mais même à ce prix là, les banquiers se feraient tirer l'oreille, jugeant la dette souveraine désormais trop risquée : ils ont aujourd'hui plus tendance à revendre les obligations qu'ils ont, même à perte, plutôt qu'à en racheter d'autres, quelle que soit la prime de risque.
En fait, en attendant de lui avoir trouvé une destination moins risquée et plus rémunératrice, les banquiers ont préféré mettre en sûreté la plus grande partie de l'argent emprunté à la BCE dans les coffres de... la même BCE, quitte à y perdre un peu, cette dernière rémunérant en effet à 0,25 % les sommes qu'elle leur a prêtées à 1 %. Ces dépôts à court terme ont atteint un niveau record le week-end des 7 et 8 janvier avec 463 milliards d'euros.
Le gouverneur de la Banque de France a annoncé qu'une nouvelle opération du même type -- prêts illimités sur trois ans à 1 % -- sera renouvelée par la BCE à la fin du mois de février. Une façon d'annoncer aux banquiers que, quel que soit l'usage qu'ils en feront -- ou qu'ils n'en feront pas --, l'argent va continuer à couler à flots dans leurs caisses. Sans autre résultat que d'alimenter la spéculation et plonger encore plus la société dans la crise.