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- Lutte ouvrière n°2263
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Leur société
« Produire français », « achetez français » : Démagogie et poudre aux yeux
Il leur fallait bien à un moment faire mine de s'intéresser aux emplois des ouvriers. Alors, en quelques jours, les candidats du PS, de l'UMP et du Modem ont visité une usine et tous ont dit la même chose, avec des mots à peine différents.
Pour Hollande il faut renforcer le « patriotisme industriel », pour Sarkozy il s'agit de « produire en France », pour Bayrou c'est « achetez français ». Mais d'autres candidats encore nous livrent une version plus ou moins intransigeante du protectionnisme.
Ces discours, enrobés des inévitables tirades sur le « génie français », sont interchangeables parce qu'ils sont tous aussi absurdes que mensongers. Chaque marchandise qui arrive dans la supérette la plus reculée du village le plus isolé est un produit de l'industrie et, comme tel, a demandé la collaboration de travailleurs du monde entier, car l'économie mondiale est un tout. Il n'y a pas de « produit industriel français », même pas le camembert, car toutes les vaches sont nourries aux tourteaux de soja, absorbent des produits de l'industrie pharmaceutique, ne pourraient vivre et être traites sans toit, sans machines et sans énergie, pas plus que les laiteries ne pourraient tourner sans produits de haute technologie, cuves inox, contrôleurs automatiques de toute sorte, machines, ordinateurs, moyens de transports, etc., qui sont tous des produits de l'économie mondiale.
Et on pourrait détailler cela quasiment à l'infini. Essayer de produire un camembert « Chaussée aux Moines » avec les seuls produits du terroir serait revenir, réellement, au Moyen Âge. Étendre cela à toute l'économie serait plongé dans la régression la plus féroce pour la population. Pourtant, malgré l'absurdité du propos, chacun y va de ses discours protectionnistes, doux, demi-sec ou hystérique, suivant les cas. Quitte à ce que le seul résultat soit de répandre un peu plus le poison nationaliste dans la population.
Car, pour ce qui est des emplois réels, dans les usines et pas dans les promesses électorales, ce sont les patrons qui décident. Areva aujourd'hui, PSA hier et nombre d'autres de moindre renom suppriment tous les jours les emplois par milliers sans que le président et ses concurrents sur le terrain du nationalisme ne disent quoi que ce soit. Ces candidats-là ne veulent en rien gêner les capitalistes.
Pour défendre leurs emplois, c'est-à-dire pour défendre leur droit à l'existence, les travailleurs n'ont qu'une solution : contraindre les patrons à prendre sur leurs profits pour pérenniser les usines, quitte, si la production diminue, à répartir le travail entre tous sans diminution de salaire. Et cela, loin de se faire contre les travailleurs des autres pays, ne peut se faire qu'avec eux, les luttes des uns renforçant celles des autres, d'un bout à l'autre de la planète, seule façon de réussir à faire de l'économie mondiale un tout harmonieux, au service de tous.