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- Lutte ouvrière n°2254
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Dans le monde
Côte d'Ivoire : Cachez cette misère que je ne saurais voir !
Le journal Le pouvoir aux travailleurs du 18 septembre, mensuel publié par l'Union africaine des travailleurs communistes internationalistes (UATCI), donne la description suivante de la situation dans les rues d'Abidjan, quelques mois après la fin de l'affrontement sanglant entre les bandes armées de Gbagbo et de Ouattara.
« Sous prétexte de lutter contre l'insalubrité, le nouveau pouvoir s'en prend aux plus pauvres. Il s'est illustré tout dernièrement par des opérations dites de « déguerpissement » et par la destruction sauvage de certains quartiers.
La ministre chargée de la Salubrité urbaine s'est transformée en bulldozer. Partout où son engin passe, il laisse derrière lui des étalages en lambeaux et des constructions éventrées. Les petits marchands et marchandes qui s'étaient installés aux abords des voies ont vu leurs étalages détruits et emportés. Naturellement, dès que les casseurs ont le dos tourné, les étalages réapparaissent comme si de rien n'était. Cela embête la ministre en charge de cette sale besogne. Elle vient de mettre en place une brigade pour empêcher que les gens se réinstallent. Cette dernière doit veiller à ce que les rues n'offrent plus à la vue des riches le spectacle de la misère, quand ils passent dans leurs grosses voitures climatisées.
Sans être devin, on sait que Anne Ouloto, tout comme Mel Théodore avant elle, n'y parviendra pas. Ce qui jette les petites gens aux abords des grandes artères pour pratiquer la vente à la sauvette, c'est la misère. Les étalages que la ministre détruit pour plaire à une certaine catégorie de la population sont le plus souvent le seul moyen de subsistance de familles entières. Dans ces conditions, la force qui pousse vers cette activité sera toujours plus forte que toutes les polices que les gouvernements successifs mettront en place pour dissuader, d'autant que la pauvreté ne fait que s'accroître au fil des ans.
Ceux qui sont rassasiés sont toujours terrifiés par le spectacle de ceux qui sont affamés, surtout quand c'est l'indigence des derniers qui alimente l'enrichissement des premiers. C'est pourquoi, comme le pouvoir en place est incapable de s'en prendre aux racines de la misère, il préfère la nier en pratiquant la politique de l'autruche. »