La direction de la RATP a présenté aux syndicats un projet auquel elle pense depuis longtemps, qui officialiserait la possibilité pour des cadres ou des agents de maîtrise de conduire les métros et les rames RER à la place de grévistes.

Elle envisagerait même pour les nouveaux embauchés maîtrises et cadres de faire figurer l'acceptation de remplacer les grévistes dans le contrat d'embauche.

Au métro et au RER, les agents de maîtrise et des cadres sont formés à la conduite mais la réglementation ne les autorise pas à conduire seuls un train avec voyageurs. Ils doivent toujours être accompagnés d'un conducteur en exercice.

Il y aurait 150 employés de ces catégories prêts à cette tâche de « jaune », c'est du moins ce qu'avance ou espère la direction, qui aurait déjà entrepris de former des maîtrises et cadres. Comme récompense, elle leur proposerait une prime mensuelle de 100 euros, quels que soit le nombre de jours de remplacement et les primes de déplacement remboursées aux frais réels.

Jusqu'à présent, la direction n'avait jamais osé s'attaquer aussi frontalement au droit de grève. Ce n'est que lors des dernières grèves sur le RER A, en décembre 2009, grève massive à près de 100 %, qu'elle avait fait rouler des cadres à la place des grévistes, aux heures de pointe seulement, et pas sur toute la ligne. Il fallait alors voir ces cadres, pas très rassurés, généralement serrés à plusieurs dans la cabine, et conduisant tant bien que mal en priant pour qu'aucun problème ne survienne.

La direction voudrait bien sûr aller plus loin. Depuis quelques années, par exemple, elle fait pression pour que les conducteurs qui veulent passer en maîtrise par promotion interne ne fassent plus du tout grève. C'est un critère obligatoire pour envisager de réussir cette promotion. Cette volonté antigrève s'applique d'ailleurs systématiquement. Dans les conflits limités à une seule ligne, par exemple, la direction peut gêner le déroulement d'une grève en faisant rouler des trains avec des conducteurs qu'elle influence, ceux dits de la réserve générale, qui peuvent conduire sur tout le réseau et sur tous les différents matériels, mais pas sur le RER.

Le projet de la direction est inacceptable. La CGT et l'UNSA le refusent et entendent contrer sa validité. Sud-RATP y est aussi opposé. De toute façon, lorsque la direction sera confrontée à une grève massive, il y a tout à parier que rien n'arrêtera la détermination des grévistes, et en tout cas pas les chiffons de papiers sur lesquels elle planche actuellement.