Procès Chirac : Le « justiciable comme un autre » aux abonnés absents07/09/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/09/une2249.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Procès Chirac : Le « justiciable comme un autre » aux abonnés absents

Deux jours avant l'ouverture de son procès, Jacques Chirac a fait savoir qu'il était incapable, pour raison médicale, de comparaître devant le tribunal de grande instance de Paris, tout en estimant, sans rire, « ce procès utile à notre démocratie, car il montre que tous les Français sont égaux devant la justice ». Pourtant, tout indique le contraire...

Après presque vingt ans de procédure, l'ex-président sera donc jugé en son absence pour des délits d'abus de confiance, prise illégale d'intérêts et détournement de fonds publics, commis avant 1995, quand il était maire de Paris et dirigeant du RPR, ancêtre de l'UMP, le parti de Sarkozy.

Depuis un an, l'entourage de Chirac expliquait qu'il voulait être jugé. En même temps, ses proches communiquaient sur la dégradation de sa santé...

Chirac est accusé d'être responsable, avec d'autres, d'avoir créé des emplois fictifs à la mairie de Paris entre 1992 et 1995. Mais, jusqu'à présent, douze années d'immunité, et pas mal d'indulgence de certains magistrats, lui ont permis d'échapper à plusieurs dossiers de financement du RPR, à l'affaire des « frais de bouche » de la mairie de Paris ou à celle de billets d'avion au financement mal identifié. Parfois, des collaborateurs comme Juppé ont été condamnés, mais lui n'a jamais été jugé, les procédures ayant été enterrées ou prescrites. La justice a su en effet se hâter lentement.

Chirac est donc poursuivi pour quelques emplois fictifs qui servaient à rémunérer parents, amis, proches ou collaborateurs du RPR ou d'associations satellites. En avril 1977, la mairie de Paris comptait 17 « chargés de mission ». Vingt ans après, la police en retrouvait 481. Devant l'ampleur des moyens qu'il aurait fallu engager, la justice s'est limitée à des poursuites sur un échantillon de personnes liées directement au cabinet du maire de Paris.

Selon le juge qui a instruit l'affaire, « Chirac est parvenu ainsi à se ménager (...) des relais dans la vie politique, y compris au croisement d'autres partis, dans la vie sociale, associative, syndicale, sportive, visant à asseoir son influence politique et à servir à plus ou moins long terme ses intérêts et ambitions, ou ceux de son propre parti (...) tout en portant atteinte aux intérêts financiers de la ville ». Mais, à l'été 2010, la Ville de Paris dirigée par Delanoé (PS) s'est entendue avec les avocats de l'UMP et de Chirac. Le parti de droite a remboursé les trois quarts du coût des emplois fictifs imputés à Chirac, soit 1,65 million d'euros, et l'ex-président le quart restant, soit 550 000 euros. En échange de quoi la ville, bonne fille, a abandonné les poursuites, ce qui devrait éviter à Chirac et à ses co-accusés toute condamnation...

Chirac n'est pas le seul homme politique à mettre à profit ses fonctions au service de la coterie politique à laquelle il appartient. Mais cette affaire a le mérite de mettre en évidence les liens entre les différentes institutions, et surtout elle permet de juger ce que valent cette justice et ces politiciens.

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