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- Lutte ouvrière n°2238
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Projet de loi sur la justice des mineurs : Le gouvernement relance la « chasse à l'enfant »
Depuis le 21 juin, les députés planchent sur un projet de loi portant sur l'entrée de jurés populaires en correctionnelle mais qui entend également réformer la justice des mineurs. Ce projet, qui n'est pas le premier du genre, prétend créer un tribunal correctionnel pour mineurs afin de juger les récidivistes dès 16 ans.
De nombreuses organisations et associations s'indignent de cette remise en cause de l'ordonnance du 2 février 1945, établissant la spécificité de la justice des mineurs. La chancellerie prétend, bien entendu, que cette proposition de loi respecte l'ordonnance de 1945. Mais alors pourquoi le ministre de la Justice, Michel Mercier, explique-t-il que cette proposition de loi se justifie par le fait que les mineurs d'aujourd'hui ne seraient plus les mêmes qu'en 1945, qu'ils seraient plus violents et plus précoces, ce qu'il est bien incapable de démontrer.
Les adversaires du projet de loi, parmi lesquels de nombreux juges pour enfant, demandent pourquoi confier le jugement des mineurs à de nouveaux magistrats et à une nouvelle juridiction, alors qu'en même temps leur compétence, leur expérience et leur professionnalisme ne sont pas contestés.
D'autres soulignent que, si ce projet était adopté, il serait en contradiction avec la Convention des droits de l'Enfant que l'État français a ratifié par ailleurs et qui stipule, dès son premier article, qu'un enfant est celui qui a moins de 18 ans.
Ce projet de loi serait aussi en complet décalage avec ce qui se préparerait en Allemagne, un pays où les problèmes de délinquance juvénile sont pourtant voisins, et qui envisage tout le contraire, c'est-à-dire reculer à 21 ans l'âge où un enfant pourrait être jugé comme un adulte !
Ce nouveau coup de canif à l'ordonnance de 1945 vient d'un gouvernement en quête de réponses sécuritaires sur des sujets qui exigeraient un tout autre investissement matériel et humain s'il avait sérieusement l'ambition de résoudre les problèmes de la délinquance des jeunes.
En ces temps où les services publics sont à l'abandon, où partout il n'est question que de supprimer du personnel et de réduire les budgets, il est évidemment plus simple de proposer la mise en place de tribunaux plus répressifs que de mettre en oeuvre une politique de proximité, nettement plus coûteuse qui pourrait compenser un peu les ravages causés par la crise qui privent la jeunesse de perspectives, et singulièrement celle des quartiers populaires.
Rajouter un cran à l'arsenal répressif est évidemment plus commode quand l'objectif réel est de partir à la chasse aux voix des électeurs les plus réactionnaires, le vrai enjeu de cette surenchère.