Les autorités tunisiennes actuelles ont créé une Commission chargée d'enquêter sur les affaires de corruption, afin de retrouver et de récupérer les biens détournés par l'ex-dictateur Ben Ali et son clan. Leur montant total est estimé entre cinq et dix milliards de dollars, une somme du même ordre que la dette extérieure de la Tunisie. La tâche ne sera pas facile, car la fortune de Ben Ali est disséminée sur de nombreux comptes, grâce à des prête-noms et des sociétés écrans dans des paradis fiscaux tels que Dubaï, Qatar, le Liban, Malte ou les Bahamas.

Les Tunisiens ont eu un avant-goût de ces richesses. La télévision a montré la perquisition de la résidence privée du couple Ben Ali, dans une banlieue de Tunis. L'ex-président en était le propriétaire, mais la louait à prix fort à l'État tunisien qui à son tour la lui concédait gratuitement comme logement de fonction : il n'y a pas de petit profit. Dans ce petit palais était caché un magot digne de la caverne d'Ali Baba : parures, bijoux, montres de luxe, pièces d'or, des liasses de billets de toutes provenances d'une valeur de 25 millions d'euros au total.

Ce trésor-là a été récupéré. Ce sera une autre affaire que d'identifier les biens de Ben Ali et de son clan à l'étranger, d'une valeur cent ou deux cents fois supérieure. Quant à récupérer les milliards encore plus nombreux extorqués aux travailleurs tunisiens par les groupes industriels et bancaires des grandes puissances, en particulier français, personne n'en a même évoqué l'idée. C'est pourtant aussi ces capitalistes qui ont été pendant vingt-trois ans les parrains et les bénéficiaires de la dictature.