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- Lutte ouvrière n°2226
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Nucléaire
Japon : Incurie du gouvernement et négligence criminelle de Tepco
Depuis le tsunami et la catastrophe nucléaire qui l'a suivi, le gouvernement japonais brille surtout par son incapacité à organiser véritablement les secours. Pourtant, il s'est immédiatement porté au chevet des banques et des grandes entreprises, qui n'étaient à ce moment en rien menacées, en leur versant sous forme de prêts à taux préférentiel 40 000 milliards de yens (350 milliards d'euros).
Mais pour venir au secours des victimes du tsunami, le gouvernement est aux abonnés absents. Une semaine après la catastrophe, 500 000 personnes n'avaient reçu aucune aide matérielle. Le journal Le Monde rapporte que des habitants de la région de Fukushima ont dû fuir par leurs propres moyens la zone menacée de retombées radioactives. Rien n'était véritablement organisé pour leur évacuation, même l'essence manquait. Une famille démunie n'a pu fuir la zone sinistrée qu'en faisant appel à l'aide d'amis de Tokyo qui sont venus la chercher sur place.
À Tokyo même, ce n'est qu'en comptant sur la solidarité de leurs concitoyens et sur les associations que les réfugiés peuvent espérer trouver un peu de nourriture et de réconfort. Entassés dans des gymnases, dormant sur des tatamis, ils ne savent pas ce qu'ils vont devenir. Ayant tout perdu, leur maison, leur emploi, ils n'ont plus aucun revenu. Certains s'inscrivent au tirage au sort qui attribuera 600 logements vacants, alors qu'il y a des milliers de réfugiés. Cette catastrophe, au départ naturelle, frappe plus durement les pauvres et devient une catastrophe sociale.
Parallèlement, l'entreprise Tepco, responsable de la catastrophe nucléaire, multiplie les communiqués parfois contradictoires. Elle a annoncé dimanche 27 mars des taux de radioactivité très alarmants, pour infirmer quelques heures après cette information et dire que les ingénieurs s'étaient en fait trompés dans leurs calculs. Dans quel cas doit-on la croire ? Cette entreprise, qui a menti pendant des années sur la dangerosité du site, qui a falsifié des rapports d'incidents, cherche certainement à minimiser les risques de radioactivité pour ne pas indemniser les victimes. Elle refuse par exemple de communiquer le nombre de travailleurs engagés dans les opérations de sauvetage de la centrale. Certains journalistes avancent le chiffre de 50, d'autres de 180.
Ce refus de communiquer sur le nombre de sauveteurs est pour le moins inquiétant, quand on sait le peu de cas que cette entreprise fait de la sécurité de ses salariés. Depuis le début des opérations, dix-sept d'entre eux ont reçu des doses dangereuses de radiations et trois ont été transportés à l'hôpital gravement irradiés, parce que l'entreprise ne leur avait même pas fourni la tenue adéquate, en l'occurrence des bottes montantes. En marchant dans une flaque d'eau contaminée, ils ont été gravement irradiés, leurs jours sont en danger.
Dans tous les cas ces travailleurs, comme les pompiers envoyés de Tokyo, risquent aujourd'hui leur vie pour sauver cette région et la vie des habitants. Et ils le font pour une somme tellement dérisoire qu'elle devrait faire honte à ceux qui osent la leur verser : les pompiers perçoivent une prime de 4,5 euros par intervention, à laquelle s'ajoutent 48 euros de prime par jour de travail dans un environnement radioactif. Pour les travailleurs du site, c'est encore pire, ils ne perçoivent que 15 euros de plus par jour ! Bien évidemment ce n'est pas pour l'argent que ces travailleurs, considérés à juste titre par leurs compatriotes comme des héros, risquent leur vie.
À la différence de Tepco et du gouvernement japonais, ils ont eux une conscience sociale. Ces travailleurs font ce qu'ils peuvent pour sauver cette région de la catastrophe, à l'image de ceux de Tchernobyl qui, il y a vingt-cinq ans, sont parfois allés sans aucune protection sacrifier leur vie.