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Grande-Bretagne : Les travailleurs municipaux face à l'austérité
Dans son plan d'austérité d'octobre dernier, le Premier ministre David Cameron avait déclaré sans ambage qu'il comptait sur les collectivités locales pour procéder « volontairement » à une partie des centaines de milliers de suppressions d'emplois publics qu'il comptait imposer.
Fin janvier, les détails de cette stratégie se sont précisés, avec la publication de la réduction de l'enveloppe budgétaire attribuée à chaque collectivité. Et il est immédiatement apparu que toutes les collectivités locales ne sont pas égales face à l'austérité du pouvoir, loin s'en faut.
Officiellement, la réduction de cette enveloppe budgétaire est censée être de 9,9 % en moyenne. Mais dans certains cas elle atteint 17 %. Et, comme par hasard, la plupart des 36 municipalités frappées par le taux maximum de 17 % comptent parmi celles où le taux de pauvreté et de chômage sont les plus élevés ! C'est ainsi qu'on y trouve, entre autres, les trois municipalités londoniennes les plus pauvres, mais aussi des villes ouvrières particulièrement touchées par les fermetures d'entreprises, comme Liverpool, Manchester, Doncaster, St Helens ou encore l'ancien centre de l'industrie navale de South Tyneside.
À l'opposé, les collectivités locales de régions très riches comme le Dorset ou le Buckinghamshire, et de villes comme Windsor (où se trouve la principale demeure d'été de la reine) ou encore Maidenhead (lieu de prédilection des milliardaires férus de régates), ne se verront imposer qu'une réduction inférieure à 1 % !
Toutes les grandes municipalités ont déjà anticipé les mesures d'austérité annoncées, en licenciant les nombreux travailleurs précaires qu'elles employaient. D'ores et déjà, de multiples infrastructures municipales ont été fermées, à commencer par des bibliothèques ou des centres de loisirs pour les personnes âgées et les jeunes.
Et maintenant, vient le tour des travailleurs fixes : un recensement fait par le GMB, deuxième syndicat parmi les municipaux, dans un tiers des collectivités locales du pays à la fin janvier, donnait 140 000 suppressions d'emplois prévues pour les six mois à venir !
Évidemment, c'est dans les municipalités ouvrières, celles où les dépenses sociales sont les plus élevées et les services publics les plus développés, que le couperet menace de tomber le plus brutalement, c'est-à-dire, dans la majorité des cas, des municipalités travaillistes.
Une telle situation n'est pas sans précédents. L'un d'entre eux fit date dans l'histoire du mouvement ouvrier, lorsqu'en 1921 la municipalité travailliste londonienne de Poplar mobilisa la population ouvrière, avec l'aide des militants du jeune Parti Communiste, et força le gouvernement de l'époque à ne pas toucher à l'aide des municipalités aux chômeurs.
Déjà à l'époque, les conseillers municipaux de Poplar s'étaient heurtés à la direction du Parti Travailliste. Mais aujourd'hui tout l'appareil du parti, dirigeants municipaux en tête, suit le nouveau leader travailliste, Ed Milliband, qui vient juste de déclarer son soutien sans réserve aux objectifs de Cameron en matière de réduction du déficit budgétaire.
Du côté des leaders syndicaux, le langage est à peine plus nuancé. Sans doute condamnent-ils la politique de Cameron, au nom d'un plan économique « alternatif » qui servira de thème à une journée nationale d'action (la première !) prévue pour le 26 mars. Mais leurs « appels à l'action » sonnent plutôt creux quand, en même temps, ils disent qu'ils refuseront leur soutien aux travailleurs qui voudraient se battre contre les suppressions d'emplois dans les municipalités travaillistes - au nom de « l'unité du mouvement »!
L'avenir dira si les pare-feux ainsi mis à place par les appareils politiques et syndicaux pour imposer aux travailleurs de faire les frais de la crise suffiront à empêcher qu'une explosion de colère mette le feu aux poudres.