Depuis trente ans que l'usine Citroën de Trémery existe, c'est le syndicat patronal SIA (Syndicat Indépendant de l'Automobile) qui était majoritaire. Il faut dire que pendant très longtemps, prendre la carte du syndicat maison a été une condition d'embauche.

Le SIA est l'héritier de ce qui s'appelait autrefois la CFT (Confédération Française du Travail) dont un commando avait tué par balles, une nuit de juin 1977, un militant de la CGT à un piquet de grève à Reims. Dans la foulée, la CFT s'était muée en CSL - Confédération des Syndicats Libres - dont est issu le SIA.

À l'usine de Trémery, qui produit des moteurs et emploie près de 4 000 travailleurs près de Metz, aux dernières élections, le SIA s'est pris une belle déculottée, perdant plus de 9 points dans le collège ouvrier (où il fait encore 27,4 %). Même dans le deuxième collège il perd près de dix points, mais obtient toujours 57,3 %. Il reste hégémonique chez les cadres, où il rafle 70,9 %, mais même là il perd 4 points.

Le lendemain des élections, c'était la panique : le local du CE était fermé jusqu'à nouvel ordre. Incroyable, pour la première fois de l'histoire de l'usine, le SIA était minoritaire au Comité d'entreprise : il n'avait que cinq élus face aux six des autres syndicats. Ceux-ci se sont mis d'accord en intersyndicale (CGT-CFDT-CFTC-SUD) pour prendre le CE au SIA.

Dans ce genre d'élection, d'ordinaire, la direction n'intervient pas, laissant les syndicats se débrouiller et choisir qui gèrera le CE. Pas à Trémery, puisque la direction a voté pour le SIA. Et comme par ailleurs une clause dans le règlement intérieur du CE attribue, en cas d'égalité de voix pour l'élection du secrétaire, le poste au syndicat ayant obtenu le plus de voix aux élections professionnelles, voilà le SIA qui garde le CE.

Ces péripéties ont au moins le mérite de montrer, pour qui aurait pu encore douter, de qui le SIA est indépendant. Pas de la direction.