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- Lutte ouvrière n°2204
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Le mouvement au jour le jour
Réquisitions et restrictions au droit de grève : Les travailleurs ont les moyens de s'y opposer !
À plusieurs reprises, des préfets ont ordonné des réquisitions pour imposer aux grévistes des raffineries de reprendre le travail. Cela s'est fait au nom du « droit au travail ». En fait, il s'agit là d'une attaque en règle contre le droit de grève.
Ce n'est pas la première fois qu'un gouvernement a recours à la réquisition pour tenter de casser une grève. Lors de la grève des mineurs, qui dura de janvier à avril 1963, le gouvernement de Gaulle avait essayé de la briser en usant de la réquisition. Le 2 mars 1963, il signait un décret de réquisition du personnel des Houillères. Ce fut sans effet face à la contagion de la grève et aux dizaines de milliers de manifestants ouvriers qui, dans le Nord comme en Lorraine, déferlèrent dans les rues de nombreuses villes. Lorsque le 7 mars de la même année le gouvernement, par la réquisition, tenta de riposter à la grève de 48 heures du personnel de Lacq bloquant le stockage du gaz, les grévistes décidèrent de prolonger leur mouvement. Le gouvernement fut impuissant devant l'ampleur du mouvement gréviste.
Ce n'est que bien après la reprise du travail dans les mines, en plein mois de juillet 1963 et de congés pour les salariés, que ce même gouvernement fit adopter par l'Assemblée nationale un projet de loi restreignant le droit de grève dans le secteur public, avec l'instauration de cinq jours de préavis avant toute grève.
Depuis, la gauche au gouvernement a fait disparaître la réquisition des textes de loi. Mais cela n'a pas empêché Sarkozy de faire introduire, en toute discrétion, dans le Code général des collectivités locales, l'article dont le gouvernement se sert aujourd'hui pour intimider les grévistes, puisqu'il laisse la porte ouverte à la réquisition de travailleurs. C'est le 18 mars 2003 en effet, alors qu'il était ministre de l'Intérieur, et sous couvert d'une loi sur la « sécurité intérieure », que Sarkozy fit adopter un texte stipulant que, « en cas d'urgence, lorsque l'atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publique l'exige et que les moyens dont dispose le préfet ne permettent plus de poursuivre les objectifs pour lesquels il détient des pouvoirs de police, celui-ci peut (...) réquisitionner tout bien ou service, requérir toute personne nécessaire ».
Adoptée en 2007, après la grève importante de la fonction publique contre - déjà - une réforme des retraites, la loi sur le service minimum représente elle aussi un dispositif antigrève, qui voudrait encadrer, limiter sinon interdire toute grève dans les services publics. Cependant, lors de la grève de la RATP de novembre 2009, le secrétaire d'État aux Transports, Dominique Bussereau, avait reculé devant la mobilisation des grévistes et renoncé à la réquisition, tout en avouant que « la loi sur le service minimum ne fonctionne pas lorsque tout le monde est en grève » !
En effet, c'est bien là la seule riposte des travailleurs à toutes les dispositions législatives antigrèves. Le gouvernement actuel, avec sa menace de réquisition assortie d'une peine de prison de six mois maximum et 10 000 euros d'amende pour ceux qui n'obtempéreraient pas, sera bien en peine de la mettre à exécution si les travailleurs, massivement, lui opposent leur détermination et leur colère.