États-Unis : Des compagnies pétrolières qu'Obama a bien servies19/05/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/05/une-2181.gif.445x577_q85_box-0%2C18%2C158%2C222_crop_detail.png

Dans le monde

États-Unis : Des compagnies pétrolières qu'Obama a bien servies

Bien qu'à l'heure où nous écrivons les nappes de pétrole n'aient pas atteint les côtes américaines, il semble bien que la pollution due à l'explosion de la plate-forme pétrolière de BP dans le golfe du Mexique soit de bien plus grande ampleur que ce qui était envisagé jusque-là.

Selon des scientifiques, la quantité de pétrole qui jaillit du puits, d'abord estimée à mille barils par jour, puis à 5 000 barils (800 000 litres) par jour, serait en fait beaucoup plus importante. D'autres scientifiques ont découvert, dans les profondeurs des eaux du golfe, de gigantesques masses de pétrole mélangées à l'eau, dont l'une a 900 mètres d'épaisseur, près de cinq kilomètres de large et quinze kilomètres de long ! Et pour l'instant tous les efforts pour stopper cette monstrueuse fuite n'ont abouti qu'à pomper un millier de barils par jour, laissant toujours échapper la très grande majorité du pétrole.

Barack Obama est monté lui-même au créneau contre les responsables de cette catastrophe : BP, condamné à de multiples reprises pour manquement à la sécurité de ses installations, de même que Transocean, l'opérateur de la plate-forme, et Halliburton, autre sous-traitant intervenu sur le puits la veille de l'explosion. Il a même mis en cause le gouvernement fédéral... celui de Bush et de ses prédécesseurs : « Pendant trop longtemps, depuis dix ans ou plus, une relation douillette s'est établie entre les compagnies pétrolières et l'agence fédérale qui les autorise à forer », a-t-il dit.

Mais Obama lui-même n'a pas failli à la tradition puisqu'il a nommé à la tête du ministère responsable Ken Salazar, un homme lié à l'industrie pétrolière, choisi, d'après Obama lui-même, parce qu'il « serait un régisseur fidèle et pragmatique de nos ressources naturelles »! Et comme par le passé l'agence fédérale MMS, Management Minerals Service, qu'il supervisait, a continué à délivrer des permis de forage alors que les compagnies pétrolières demandeuses n'avaient pas obtenu les autorisations préalables, pourtant en principe obligatoires, concernant les risques pour l'environnement.

Depuis janvier 2009, MMS a délivré pas moins de 349 autorisations de forage, dont celui qui a abouti à la catastrophe d'aujourd'hui, qui a tué onze personnes et en a blessé dix-sept. En fait ce sont des milliers de puits qui exploitent ainsi la partie occidentale du golfe du Mexique.

Moins d'un mois avant l'explosion, Obama avait annoncé son intention d'étendre les zones de forage à la partie orientale du golfe et en Alaska - dans des zones protégées depuis vingt ans par un moratoire - à la grande satisfaction des compagnies pétrolières. Il reprenait ainsi l'essentiel d'un projet de Bush. Lui qui prétend avoir une politique d'énergies propres a dû se livrer à quelques contorsions sur la nécessité dans l'immédiat d'assurer la sécurité et l'indépendance énergétique du pays, d'aider à la relance économique et de créer des emplois, afin justement de pouvoir développer des énergies propres ! Et il en a profité pour encenser son ministre, Ken Salazar, pour le travail accompli et affirmer que, « sous la direction de Ken Salazar, nous allons employer de nouvelles technologies qui réduiront les risques de l'exploration pétrolière. Nous allons protéger les zones qui sont essentielles pour le tourisme, l'environnement et notre sécurité nationale. »

On comprend l'embarras d'Obama, qui maintenant fait montre de fermeté et promet maintes réformes « pour que cela n'arrive plus ». Il propose de réformer la MMS, qui aujourd'hui à la fois délivre les autorisations de forage, est censée veiller à la sécurité, et touche des royalties sur le pétrole extrait ! Il dit vouloir obliger les responsables de la catastrophe à en payer les frais, et pour cela changer la loi qui limite à 75 millions de dollars ce à quoi ils peuvent être condamnés, en plaçant la barre à 10 milliards de dollars.

Tout cela n'est que poudre aux yeux. Il est évident que ni BP, ni Transocean ou Halliburton, ou toute cette chaîne de complicités internes à l'administration, ne pourront compenser la perte de onze vies humaines, et qu'ils ne compenseront - s'il le font un jour - qu'une infime partie des dommages qu'ils auront causés. Et de telles catastrophes se reproduiront inévitablement, tant que la course au profit écartera la plupart des mesures de sécurité pourtant bien connues, tant qu'elle mènera à une exploitation sauvage des hommes et de la nature.

Les grands groupes capitalistes imposent leur loi à toute la société et les gouvernements sont là pour les aider à perpétrer leurs méfaits et à les faire accepter par la population.

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