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Leur société
Retraites : La campagne contre les salariés bat son plein
Profitant de fuites opportunes, Le Monde a fait état sur son site Internet d'informations sur le projet gouvernemental de « réforme » des retraites. Des « sources concordantes » lui auraient permis d'affirmer que Sarkozy envisageait de reculer l'âge légal de départ à 61 ans en 2015, 62 ans en 2020 et 63 ans en 2030.
Il s'agirait, selon le journal, de vider de sa substance la barrière des 60 ans désormais reléguée au rang de symbole, en augmentant le nombre de trimestres de cotisations nécessaires à une retraite à taux plein, et même d'instaurer une décote suffisamment dissuasive en cas de départ avant le nouvel âge légal ; de la sorte, les pensions en seraient considérablement amputées.
L'Élysée a démenti ces informations, les qualifiant « d'absurdes » et Éric Woerth, le ministre du Travail, les a déclarées « fondées sur rien ». C'est selon lui seulement à la mi-mai que le gouvernement fournirait un « document d'orientation » présentant les « pistes » de l'avant-projet de loi. Pour l'instant, on n'en serait qu'à la « phase de concertation qui va durer très longtemps ».
Il n'empêche qu'à l'aide de « fuites », de démentis, de rumeurs, la campagne de Sarkozy et de son gouvernement pour essayer de présenter leurs attaques contre le système de retraite des travailleurs comme une « réforme » inéluctable continue. De sondages en bilans tronqués, de chiffres alarmistes en rendez-vous avec les « partenaires sociaux », la propagande se développe obstinément, preuve que Sarkozy est loin d'être convaincu que le monde du travail se pliera sans trop de réactions à cette nouvelle manière de servir ses amis de la finance.
Face à ce véritable rouleau compresseur mis en place par l'Élysée, les prises de position des dirigeants de l'opposition, politiques et syndicaux, semblent bien timides. François Chérèque par exemple affirme que « la retraite à 60 ans ne doit pas bouger », mais admet que « le reste est discutable », au point d'évoquer par ailleurs « un allongement de la durée ». Les dirigeants du Parti Socialiste ne ferment pas la porte à une « réforme efficace et juste », selon les termes de Martine Aubry. Et selon le député Pascal Terrasse, membre du Conseil d'orientation des retraites, « si cette réforme porte sur un horizon long, et pas sur des mesures pour 2012 ou 2015, il n'y aura aucun tabou de notre part. La durée de cotisation pourra être en débat. »
Bernard Thibault, pourtant opposé au projet sarkozyste, ne montre pas sur cette question la fermeté que seraient en droit d'attendre les militants de son syndicat et, au-delà, tous les travailleurs. Le dirigeant de la CGT a au contraire des accents parfois étrangement compréhensifs. « Il est un fait, dit-il, que la France est sous les fourches caudines [des agences de notation] qui exigent du gouvernement français, singulièrement sur le dossier des retraites, qu'il donne des gages en procédant à des économies ».
Et quand bien même cela serait ? Aucune excuse ne devrait être donnée au gouvernement car, quels que soient les prétextes invoqués par Sarkozy pour s'attaquer au système de retraite, il ne vise qu'à organiser un pillage systématique des cotisations et des pensions au profit du grand patronat, des actionnaires et des banques, les seuls bénéficiaires des « réformes », les seuls destinataires des économies réalisées par l'État. Le gouvernement n'est pas contraint, mais toujours complice.
Le calendrier unilatéralement fixé aux « partenaires », convoqués de sommet social en sommet social, par exemple le 10 mai prochain, la parodie de concertation imposée par Sarkozy et ses ministres, ne doivent pas masquer la détermination de ceux-ci à satisfaire rapidement leurs donneurs d'ordres. Alors, il faudra bien que le monde du travail fasse lui aussi preuve d'une détermination puissante et massive, pour que ses adversaires rangent leur forfait au magasin des tentatives avortées.