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- Lutte ouvrière n°2177
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Leur société
Charente-Maritime et Vendée : zones noires de Xynthia : pavillons rasés, villas préservées
Les manifestations de colère d'habitants menacés d'expulsion en Charente-Maritime et en Vendée ont obligé une brochette de ministres, autour de Jean-Louis Borlo, à se rendre sur place, mais sans rien promettre d'autre qu'un examen au cas par cas.
Outre le mépris du gouvernement, qui n'a daigné consulter ni les habitants ni les maires des communes concernées pour définir les zones noires où les maisons doivent être détruites, les sinistrés dénoncent aussi l'inégalité de traitement dont ils sont victimes. La délimitation des zones noires d'expropriation ne semble pas en effet obéir qu'à des critères topographiques, comme l'altitude des terrains par rapport à la mer : elles épousent parfois des frontières de classe.
Ainsi l'île de Ré, pourtant largement inondée, et même coupée en trois îles comme au Moyen Âge, est quasiment exempte de zone noire, et de grands travaux sont en cours pour la protéger par des digues. Dans un même temps, des zones moins inondées sont vouées à être rasées. Les habitants n'ont obtenu que de fausses explications, comme une prétendue volonté d'éviter des zones « peaux de léopard ». Une habitation entourée de maisons inondées doit être rasée, même si elle a été épargnée par les flots. Mais en quoi cela justifie-t-il que des zones entières de riches villas sur l'île de Ré soient exemptées ?
Dominique Bussereau, intervenu sur France 3 le 14 avril pour nier tout favoritisme dans la définition des zones noires, dut cependant reconnaître que « les choses sont très différentes » selon qu'il s'agit d'un terrain coûtant 1 million d'euros les 3 500 mètres carrés sur l'île de Ré ou de terrain à 3 euros le mètre carré.
En fait, nul besoin de piston pour pareille injustice. On trouve une explication dans une loi faite sur mesure pour protéger les plus riches. Selon une circulaire de février 2005, on ne peut procéder à une expropriation que si « le coût estimatif de l'acquisition est moins élevé que celui des autres moyens envisageables de sauvegarde et de protection des populations ». C'est parfaitement clair : un lotissement de modestes pavillons situé sur une zone où le terrain est bon marché sera détruit, car une digue coûterait plus cher que leur rachat. Mais construire une digue pour protéger de riches villas, même peu nombreuses, sera jugé valable si ces villas coûtent plus cher que la digue.
Les plus riches protégés, les plus modestes chassés : voilà le tracé des « zones de solidarité », nouveau nom dont le gouvernement vient de rebaptiser les « zones noires ».