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Leur société
Écologistes : En piste pour 2012 ?
Euphorisés par leurs scores aux élections régionales, les chefs de file écologistes, Cohn-Bendit en tête, se considèrent déjà comme des héritiers d'une force électorale durable, qu'il leur faut, disent-ils, étayer pour affronter la prochaine épreuve, celle de l'élection présidentielle de 2012. Tel est le sens de la déclaration, publiée dans Libération du 22 mars, intitulé « Inventons ensemble une coopérative politique ».
Ce que l'on appelle déjà « le second appel du 22 mars » (le premier, dont ce même Cohn-Bendit était l'un des auteurs, date du 22 mars 1968) vise donc à proposer une formule qui permettrait à Europe-Écologie, création de circonstance, faite de bric et de broc, rassemblant à la fois des femmes et des hommes liés tout aussi bien aux Verts qu'à Nicolas Hulot, c'est-à-dire qui acceptent de se voir étiquetés à gauche pour le moment, et d'autres qui s'y refusent, de continuer à exister, électoralement au moins, jusqu'en 2012, et si possible au-delà.
Ce qui apparaît avec force dans une telle démarche, c'est la volonté de faire de mieux en mieux, d'élection en élection, pour être de ceux qui se partageront les postes après l'élection de 2012.
Mais le dilemme aujourd'hui, pour Cohn-Bendit et les siens, c'est qu'une telle ambition n'est ni originale ni nouvelle. Il ne reste plus, pour laisser croire qu'on fait du neuf, qu'à jouer avec les mots. Des formules, il y en a eu de tous ordres par le passé, pour faire preuve d'innovation en la matière. La « coopérative politique » que propose Cohn-Bendit en est un nouvel avatar. La formule permet d'y mettre tout et son contraire, de sembler éviter le dirigisme d'un appareil, de laisser la parole et l'initiative à la base, sans entraver l'action et les ambitions de ceux qui incarneront et seront les dirigeants sans contrôle de cette coopérative.
Hier, on parlait de « démocratie participative », aujourd'hui, voilà la « coopérative politique »... qu'il faudrait inventer. Mais comment, à partir de quoi, en mêlant par exemple écologistes, socialistes, associatifs, communistes, comme le propose Cohn-Bendit, ou encore, comme il le suggère aussi, par des « chats » sur Internet ? Et pour faire quoi ? Pour rechercher une formule qui permettrait de décider s'il vaut mieux un candidat unique de ce que l'on a bien du mal à encore appeler la gauche, au premier tour de la présidentielle, ou s'il est préférable que chacune de ses composantes se présente séparément au premier tour, pour se coaliser autour d'une candidature au second ? Cela paraît totalement dérisoire, insignifiant, au regard des problèmes que rencontre la population laborieuse. Plus encore dans cette période de crise. C'est pourtant la préoccupation majeure, sinon unique, de cette mouvance, si fière d'avoir conquis le titre de troisième force (sur le terrain électoral) de France.
À partir de là, il est à prévoir que la tendance qui marquera l'évolution de cette mouvance, du moins de ses chefs de file et de ceux qui en attendent honneurs et prébendes, se traduira par une prise de distance de plus en plus marquée avec des formations situées, ne serait-ce que par leur histoire, à gauche. Ce ne serait qu'un retour à la vérité. Cohn-Bendit incarne une telle évolution, mais milite pour qu'elle s'accélère et se concrétise au plus vite.
Finalement, au-delà du débat, académique, pour décider sous quelle étiquette il faudrait les classer, ce qui est certain, c'est qu'à aucun moment de leur histoire les écologistes n'ont été liés au mouvement ouvrier, à la classe ouvrière, à ses préoccupations, à ses difficultés, à ses combats de tous les jours.