Sarkozy en Haïti : Le rapace camouflé en colombe24/02/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/02/une2169.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Sarkozy en Haïti : Le rapace camouflé en colombe

Lors de son escale à Haïti le 17 février, Sarkozy a voulu donner au monde le visage du bon samaritain venant tendre une main secourable aux victimes du séisme.

Il a joué la comédie de la contrition en évoquant « les blessures de la colonisation » et a rappelé le fardeau financier imposé en 1825 à Haïti par la France pour reconnaître son indépendance, fardeau qui a pesé tout au long du 19e siècle et explique en partie la pauvreté de l'île : « Même si je n'avais pas commencé mon mandat au moment de Charles X, j'en suis quand même responsable au nom de la France », a conclu Sarkozy.

Sarkozy s'excuse pour un passé lointain, qu'à juste titre les Haïtiens n'ont certainement pas pardonné, mais ce qu'il a maintenu dans l'ombre, c'est que, tout au long du 20e siècle, Haïti a été pillé par les puissances impérialistes et que le peuple haïtien a continué à payer sa dîme à l'impérialisme français. Ainsi, plutôt que cette comédie de la repentance, Sarkozy aurait pu donner des nouvelles de l'ancien dictateur Jean-Claude Duvalier, accueilli en France depuis 1986 après que la population de Port-au-Prince l'avait chassé du pouvoir. Duvalier a trouvé refuge en France après avoir littéralement pillé les caisses de l'État, emportant une fortune supérieure à la dette extérieure d'Haïti. Et si les autorités françaises se sont montrées hospitalières avec l'ancien dictateur, c'est qu'elles en avaient été les complices pour mettre l'île en coupe réglée.

Sarkozy a annoncé 325 millions d'euros d'aides pour Haïti, qui seront distribuées entre 2010 et 2011. La somme est dérisoire en comparaison des 14 milliards de dollars estimés nécessaires par la Banque interaméricaine de développement pour la reconstruction. Ces 325 millions d'euros annoncés par Sarkozy sont entre autres l'addition d'une promesse de livraison d'une centaine de véhicules de police et de gendarmerie, de 1 000 tentes et 16 000 bâches, de l'annulation des 56 millions de dettes que les bailleurs de fonds français réclamaient à Haïti, alors que de toute façon le pays est en miettes et a déjà remboursé au centuple ses emprunts. Au total l'aide financière réelle se monte à 100 millions d'euros. À titre de comparaison, le porte-avions Charles-de-Gaulle a coûté à lui seul plus de trois milliards d'euros.

Derrière la générosité de façade de Sarkozy, il y a la volonté pour l'impérialisme français de demeurer dans la course à la reconstruction. Car finalement une bonne partie de ces aides retourneront dans les caisses des groupes industriels et des sociétés qui mettront la main sur les chantiers. Et pour Sarkozy il n'y a aucune raison d'en laisser les bénéfices aux seuls États-Unis.

Alors bien sûr, il y a urgence en Haïti, urgence à répondre aux besoins de première nécessité pour la population et urgence de reconstruire, ou plutôt de construire. Mais ce ne sont pas les dirigeants des puissances impérialistes, et notamment pas Sarkozy, qui pourront donner un avenir au peuple haïtien et faire pardonner le pillage séculaire du pays.

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