La Poste : Un pas de plus vers la privatisation21/01/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/01/une2164.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La Poste : Un pas de plus vers la privatisation

L'Assemblée et le Sénat ont adopté la loi transformant La Poste d'établissement public en société anonyme à compter du 1er mars prochain.

« Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de vous demander, au passage, si vous connaissez un seul pays au monde qui aurait la volonté de privatiser un tel établissement en commençant par y injecter 2,7 millions d'euros d'argent public ? », avait déclaré le ministre de l'Industrie, Christian Estrosi, le 2 novembre dernier, pour nier la volonté du gouvernement de privatiser La Poste alors qu'il la transforme en société anonyme. Mais, contrairement à ce que le ministre laisse entendre, une privatisation de La Poste n'empêcherait pas l'État de continuer à intervenir, au contraire, ... pour renflouer l'entreprise, afin de garantir à ses actionnaires une meilleure rentabilité financière.

L'exemple de France Télécom en 1997 et celui, tout récent, de Gaz de France montrent que la transformation en société anonyme est une étape vers la privatisation. La rédaction actuelle de la loi postale l'exclut-elle ? Dans ce cas, il suffira de la changer, comme cela avait été fait pour France Télécom, où dans un premier temps il s'agissait « d'ouvrir le capital » avec une participation de l'État d'au moins 50 %, et ensuite de lever cette restriction devenue gênante. Déjà, le gouvernement socialiste de Jospin était orfèvre en la matière.

Un autre volet de la nouvelle loi postale consiste à supprimer le monopole résiduel de La Poste pour la levée, le tri et la distribution des plis de moins de 50 grammes, en application de trois directives européennes qui ont prévu une libéralisation progressive du secteur postal, dont la première, en 1997, avait reçu l'aval du gouvernement socialiste de Jospin et les deux suivantes, en 2002 et 2008, celui des gouvernements de droite.

Le gouvernement actuel jure que la nouvelle loi ne se justifie que par une modernisation et une adaptation à la nouvelle donne. Selon lui, elle viendrait même renforcer la « mission d'aménagement du territoire » de La Poste en inscrivant un nombre minimal de 17 000 « points de contact » sur l'ensemble du territoire. Mais c'est une mauvaise blague puisque rien n'empêchera La Poste de continuer à supprimer des bureaux de plein exercice, qui ne sont déjà plus que 10 650, aux côtés de 4 600 agences postales communales et de 1 750 relais chez les commerçants. Et le financement de ce qui n'est pas directement rentable dans la distribution du courrier à travers le territoire, qui était jusqu'à présent inscrit dans un fonds alimenté par la taxe professionnelle, est renvoyé à un décret.

La loi prévoit aussi l'accès à Internet dans les bureaux de poste, mais ce n'est qu'un principe qui ne sera d'abord effectif que dans une centaine de bureaux. À propos des horaires d'ouverture, ils devront s'adapter aux modes de vie, notamment par l'ouverture d'un bureau jusqu'à 21 heures dans les villes de plus de 50 000habitants et par un « encadrement des réductions de ces horaires ». La loi fait mine de s'intéresser au public, alors que la course effrénée aux suppressions d'effectifs fait des ravages depuis des années. Près de 12 000 emplois sur 295 000 ont été supprimés, selon les syndicats, en 2009 et la nouvelle loi ne peut qu'inciter la direction de La Poste à mettre la pression, sauf bien entendu si les travailleurs, avec l'appui des usagers, décident de s'opposer à la dégradation des conditions de travail qui accompagne les suppressions d'emplois dans les services publics comme dans l'industrie.

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